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Mettre en valeur la force intérieure

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trois personnes qui se lient les bras

CSMC & Dystrophie musculaire Canada

Par : Allison Cowan

Soyez les bienvenus au deuxième épisode de la série CSMC &, conçue pour faire connaître les membres de PartenaireSanté, où nous déterminons comment nos réalités se recoupent et comment nous pouvons nous soutenir les uns les autres.

Puisque septembre est le Mois de la sensibilisation à la dystrophie musculaire, la vice-présidente des Affaires externes et du Développement de la CSMC, Allison Cowan, s’est entretenue avec Stacey Lintern, PDG de Dystrophie musculaire Canada, pour en apprendre davantage sur la force et la résilience hors du commun d’une communauté méconnue et trop souvent sous-estimée.

Lorsque j’ai rencontré Stacey Lintern, directrice générale de Dystrophie musculaire Canada, elle m’a exposé de façon très claire le défi auquel est confrontée la communauté des personnes atteintes de troubles neuromusculaires (TNM).

« Nous vivons dans un monde où il faut s’activer sans répit », a expliqué Mme Lintern. « Ce rythme effréné que nous nous imposons se traduit non seulement par le risque de marginaliser les personnes atteintes de TNM, mais aussi par des conséquences dommageables. »

Elle a donné l’exemple de la dystrophie musculaire de Duchenne, même si elle aurait pu choisir n’importe laquelle des 160 maladies et plus qui relèvent du mandat de Dystrophie musculaire Canada.

« Imaginez un petit garçon [la dystrophie musculaire de Duchenne touche les personnes de sexe masculin assigné à la naissance] qui a du mal à suivre en classe, qui semble fatigué, qui n’arrive pas à enfiler rapidement ses vêtements pour aller à l’extérieur, et on lui dit de se dépêcher, d’arrêter de flâner, de se concentrer. En réalité, non seulement il est physiquement incapable d’accomplir ces actions, mais il endommage carrément ses muscles à force d’essayer. »

« Dans le cas de la maladie de Duchenne, poursuit Mme Lintern, qui n’est généralement pas diagnostiquée avant que la maladie ait progressé, vers l’âge de trois ou quatre ans, l’enfant ne produit plus de dystrophine (qui est une protéine nécessaire au maintien de la force musculaire). En deux mots, l’enfant ne peut pas récupérer ce qu’il a perdu, et la perte s’est accélérée en raison des efforts qu’il a déployés pour tenter en vain de suivre ses pairs. »

Malheureusement, dans le cas de la maladie de Duchenne et de nombreux autres TNM, ces pertes ne cesseront de s’accumuler, ce qui réduira l’espérance de vie et nécessitera souvent des soins 24 heures sur 24. 

Décoder la complexité d’un diagnostic

Puisque les maladies neuromusculaires se caractérisent par un ensemble de symptômes, une imprévisibilité du moment de leur apparition et des degrés variés de sévérité, leur nature complexe pose un défi à notre système de soins de santé déjà trop sollicité et met des bâtons dans les roues des médecins chargés de dénouer le nœud gordien que représente le diagnostic.

L’organisme Dystrophie musculaire Canada interagit avec plus de 27 000 personnes inscrites dans sa base de données, dont environ 16 000 sont des aidants naturels. Le suivi des expériences individuelles alimente le corpus évolutif de données probantes que l’organisme utilise pour influencer les changements de politique.

« Nous nous appuyons sur des données probantes, que nous nous efforçons de convertir en conseils avisés à l’intention des décideurs politiques. Les TNM nécessitent un investissement considérable, car leur gravité entraîne souvent une pression écrasante sur les services – qu’il s’agisse du système de soins de santé, de l’aide communautaire ou sociale, pour ne citer que quelques exemples. »

Avec éloquence, Mme Lintern décrit ces troubles comme étant « rares sur le plan individuel, mais communs sur le plan collectif », produisant une combinaison parfaite de diagnostics erronés et de malentendus. La conjugaison de ces réalités engendre une omniprésence de la stigmatisation, qui alourdit le fardeau pesant sur les épaules de personnes qui ont déjà hérité de lourdes épreuves de la vie.

Le poids de l’incertitude

« Dans certains cas, il faut compter près de 17 ans avant d’obtenir un diagnostic, explique Mme Lintern. Les symptômes apparaissent au départ sous la forme d’une faiblesse musculaire dans les mains ou les pieds, et le manque de connaissances, même au sein du corps médical, fait que les patients ne sont pas orientés vers des neurologues, mais plutôt vers des physiothérapeutes et, dans certains cas, vers des psychiatres. »

Faire face à cette incertitude constitue un véritable défi, car les personnes concernées doivent composer avec leurs symptômes physiques, mais aussi avec les pressions psychologiques qui accompagnent le fait d’être rejeté ou de ne pas être cru.

« Ajoutez à cela, poursuit Mme Lintern, la frustration quotidienne de perdre le contrôle de sa propre autonomie corporelle et vous obtenez des personnes qui doivent puiser en eux pour trouver une force extraordinaire et survivre dans un monde qui, non seulement ne tient pas compte de leurs besoins, mais qui leur manque de considération. »

Une partie de la mission de Dystrophie musculaire Canada consiste à aider la communauté à retrouver une partie du contrôle qu’elle a perdu.

« Nous sommes fiers de l’engagement des patients, mais tout autant de leur leadership. Notre travail consiste à leur donner une tribune, car ces personnes sont parmi les plus fortes, les plus résilientes et dotées de la plus grande capacité d’adaptation qu’il m’ait été donné de rencontrer. Et il n’est pas galvaudé d’affirmer que ces gens ont beaucoup à nous apprendre. »

Reprendre le contrôle

Mme Lintern a décrit les frustrations quotidiennes auxquelles une personne atteinte de troubles neuromusculaires peut être confrontée, qu’il s’agisse de l’attente d’une aide à domicile arrivant à une heure différente chaque jour, de la difficulté à accomplir des tâches quotidiennes banales, comme boutonner son chemisier, ou de l’indignité de ne pas pouvoir obtenir des soins de base en raison de limites physiques, comme l’incapacité de passer d’un fauteuil roulant à une table d’examen.

Si l’on ajoute à cela la pénurie de spécialistes, la stigmatisation de la société et le fardeau psychologique que représente le fait d’être confronté à une maladie incurable, on se retrouve en présence d’un groupe qui aurait toutes les raisons de se sentir exclu.

Stacey Lintern, directrice générale de Dystrophie musculaire Canada

Pourtant, grâce aux conseils de ses membres, Dystrophie musculaire Canada est en train de réécrire l’histoire.

L’organisme a notamment investi des sommes considérables dans une ligne d’assistance téléphonique qui aide les personnes et leurs proches aidants à obtenir des renseignements exacts, opportuns et pertinents sur les recherches, les traitements et les essais cliniques les plus récents. De plus, un programme de sensibilisation des patients est en œuvre afin de doter les personnes ayant un savoir expérientiel des connaissances et des compétences requises pour effectuer des examens par les pairs d’études potentielles et d’en évaluer les résultats.

Dystrophie musculaire Canada ne se contente pas de proclamer une approche centrée sur la personne. Elle joint le geste à la parole.

Diriger, en coulisses

« Nous travaillons en partenariat avec des pairs évaluateurs cliniciens, et nous offrons donc la même possibilité aux patients évaluateurs. C’est un signe qu’ils sont aussi appréciés et importants dans le processus que les cliniciens assis à côté d’eux, explique Mme Lintern. Nous croyons en ce principe : Rien de ce qui me concerne ne doit se faire sans m’impliquer, et c’est un engagement que nous partageons avec nos pairs internationaux. Nous nous mettons mutuellement au défi de réfléchir plus intelligemment et en profondeur à la manière de faire participer les personnes ayant un savoir expérientiel à tous les aspects de notre prise de décision. »

En réponse à un besoin exprimé par la communauté de TNM, l’organise propose également des « classes de maître » accréditées aux médecins, au personnel infirmier et aux professionnels paramédicaux, afin de générer une meilleure compréhension des troubles et, à terme, de tracer la voie d’un diagnostic plus rapide.

« Le temps presse, rappelle Mme Lintern, en évoquant notamment l’urgence de multiplier les tests de dépistage chez les nouveau-nés de façon à y inclure l’amyotrophie spinale. Il s’agissait de la maladie génétique la plus mortelle chez les enfants de moins de deux ans, mais nous nous sommes efforcés de changer cela. »

L’organisme a élaboré un plan recommandant un dépistage généralisé, lequel devait être adopté province par province et territoire par territoire. À force de persévérance et de preuves tangibles, ils sont parvenus à avancer de cinq ans le délai de huit ans qui leur était imparti.

D’ici le mois de septembre 2024, chaque province et territoire participera. Grâce à l’engagement indéfectible de Dystrophie musculaire Canada, les nourrissons peuvent maintenant recevoir un traitement qui changera leur vie avant même que les symptômes se manifestent, peu importe où ils sont nés sur le territoire canadien.

Bien que Dystrophie musculaire Canada considère ce succès comme un triomphe, il convient également de rappeler l’ampleur du travail qu’il reste à accomplir. Mme Lintern souhaite que ces dépistages soient élargis pour inclure davantage de personnes atteintes de TNM, mais ses ambitions ne s’arrêtent pas là.

« Toutes les personnes ne sont pas traitées de la même manière – ni équitablement – au sein de notre communauté », déclare-t-elle. « Il est déjà difficile d’accéder à des thérapies novatrices au Canada, mais pour certains membres de notre communauté, le critère de base pour participer à un essai clinique se résume à un test de marche de six minutes. Si vous ne pouvez pas satisfaire à ce critère, vous êtes rejeté d’emblée. »

Réduire les obstacles

Ancienne clinicienne, Mme Lintern a travaillé dans le domaine des soins infirmiers communautaires pour aider à l’intégration des personnes handicapées, et elle se sent blessée et indignée au nom de ceux dont les possibilités et les contributions sont limitées par des barrières tout à fait arbitraires.

« Dystrophie musculaire Canada a été invité à codiriger les consultations pour le Plan d’action pour l’inclusion des personnes en situation de handicap du Canada, et nos conclusions étaient sans surprise : un meilleur accès aux traitements, des logements accessibles et abordables, des aménagements pour l’emploi. De plus, au sein de notre propre communauté, à maintes reprises, nous avons entendu que le soutien à la santé mentale était impératif pour faire face à un pronostic qui bouleverse la vie. »

Mme Lintern précise que lorsqu’une personne reçoit enfin un diagnostic « sans appel », la sensation de soulagement qui accompagne la validation des symptômes est très vite éclipsée par l’accablement lié à l’annonce d’une telle nouvelle.

Les soins de santé mentale, un impératif 

« Lorsque votre avenir vous réserve des bouleversements comme, tout à coup, le besoin d’une botte pour un pied tombant, puis une canne, un triporteur, un fauteuil roulant, un ventilateur… au fur et à mesure que vous franchissez des jalons inversés, il devient urgent de recevoir du soutien psychologique pour faire face à l’anxiété et à la dépression. Cette prise en charge est un impératif, pas un luxe. »

En bref, les soins de santé mentale sont essentiels à la communauté des personnes atteintes de TNM, et il en va de même pour les aidants.

Une partie du travail de Dystrophie musculaire Canada consiste à trouver des commanditaires souhaitant organiser des retraites pour les aidants, afin d’offrir un répit bien mérité aux conjoints, aux parents et aux enfants des personnes touchées par la maladie. Leur santé mentale est également mise à rude épreuve et figure parmi les principaux services recherchés par les ressources de soutien aux patients de l’organisme.

« Nous travaillons très fort pour le bien de cette communauté. Mais nos actions, aussi dévouées soient-elles, ne sont pas comparables à la volonté de ces personnes de s’investir chaque jour.  Nous ne pouvons pas, et nous ne devons pas, mesurer leur valeur à partir de critères factices, comme une marche de six minutes. Cela revient à attribuer une valeur sur la base d’un critère si réducteur et si peu exhaustif. Qu’en est-il de leur vie de famille? De leurs amitiés? De leur travail? De leurs activités de bénévolat? Et elles participent à tout cela malgré les énormes contraintes quotidiennes qu’elles ont à surmonter. »

Vers la fin de notre conversation, Stacey m’a laissée avec cette pensée, que je n’oublierai pas de sitôt :

« Ces personnes sont les plus résilientes que je connaisse.  Elles sont des héros au quotidien. La pitié et les banalités ne leur sont d’aucune utilité. Elles ont besoin – et méritent – d’avoir accès à des ressources à la hauteur de leur force intérieure. Pour certains, cette force pourrait être imperceptible, mais pour tous ceux d’entre nous qui ont le privilège de travailler au contact de cette communauté, sachez qu’elle nous inspire une admiration infinie, jour après jour. »

Allison Cowan est la Vice-présidente, Affaires extérieures et développement (intérimaire) de la Commission de la santé mentale du Canada

Avertissement

Le contenu de nos blogues n’est pas destiné comme substitution à une opinion médicale, professionnelle, à un diagnostic ou à un traitement. Demandez toujours conseil à votre fournisseur de soins de santé si vous avez des questions concernant votre santé mentale. Si vous êtes en état de détresse, veuillez appeler ou texter le 988 n’importe quand. En cas d’urgence, appelez le 9-1-1 ou rendez-vous à votre service d’urgence local.

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