La pandémie aura eu au moins un côté pas si pire : celui de braquer les projecteurs sur la santé mentale dans les médias et les conversations de tous les jours.
Nous sommes nombreux à faire le point sur le bien-être des autres comme jamais nous ne l’avions fait auparavant. Cependant, de nombreuses personnes trouvent difficile d’avoir une conversation avec une personne qui pourrait connaitre un déclin de sa santé mentale ou qui pourrait vivre avec une maladie mentale. On pourrait soupçonner qu’un membre de notre famille, un ami ou une connaissance ne va pas bien, mais comment commencer ce genre de conversation?
Commençons par utiliser un vocabulaire centré sur la personne.
Qu’est-ce que le vocabulaire centré sur la personne?
Ce type de vocabulaire accorde plus d’importance à la personne qu’à la maladie, à l’invalidité ou à la condition.
Denise Waligora, Spécialiste de la formation et de la prestation pour Premiers soins en santé mentale Canada, explique l’importance du vocabulaire centré sur la personne :
Nous ne définissons pas une personne par son problème/diagnostic. Une personne n’est pas sa maladie. Lorsque nous définissions les personnes par leurs maladies, c’est tout ce que les autres voient. Ils ne voient plus la créativité, la gentillesse, l’originalité, l’intelligence que la personne possède. Ils ne voient plus la personne pour ce qu’elle est. Ils voient juste la maladie et toute la désinformation/les mythes qui vont avec cette maladie.
Le vocabulaire centré sur la personne nous demande d’être conscient des mots que nous utilisons. Il nous demande de nous concentrer sur la personne plutôt que sur sa maladie.
En raison de la prévalence du vocabulaire stigmatisant, une personne qui vit avec un problème de santé mentale pourrait être dans l’incapacité de se voir comme autre chose que son diagnostic ou sa condition. Cela pourrait l’empêcher de concrétiser son plein potentiel. Les personnes qui vivent avec une maladie mentale ont besoin de comprendre qu’elles ne sont pas la maladie mentale en elle-même mais plutôt que la maladie mentale est quelque chose avec laquelle elles vivent. C’est pareil pour les personnes connaissant un déclin de leur bien-être mental. Le vocabulaire centré sur la personne peut aider les personnes qui vivent avec un problème de santé mentale pour comprendre qu’elles ne s’arrêtent pas à leur maladie ou condition.
Utiliser du vocabulaire centré sur la personne fait preuve de respect pour la personne plutôt que de la grouper en catégories ou de l’étiqueter. Les mots comme « anormal », « dysfonctionnel » ou « handicapé » peuvent être particulièrement nuisibles.
Vous pourriez vous considérer comme un allié de la santé mentale, mais si vous utilisez du vocabulaire stigmatisant, les personnes qui vivent avec un problème de santé mentale pourraient être moins susceptibles de vous approcher.
Malheureusement, le vocabulaire stigmatisant est assez courant dans notre culture. Lorsque vous écoutez la TV, parlez à des amis ou à de la famille ou un collègue, avec-vous déjà entendu du vocabulaire comme celui-ci?
- « C’est débile. »
- « Avant, c’était un drogué. »
- « Elle souffre de dépression. »
- « Il s’est tué. »
Denise Waligora insiste sur le fait que si nous nous éloignons de ce vocabulaire stigmatisant pour nous diriger vers un vocabulaire centré sur la personne, cela peut contribuer à la lutte contre la stigmatisation attachée à la maladie mentale et au déclin du bien-être mental :
Lorsque nous nous informons, nous faisons mieux. La capacité à être conscient du vocabulaire respectueux peut ouvrir des portes pour que les personnes soient à l’aise au moment de parler de leur bien-être mental ou des difficultés qu’elles pourraient connaître. Imaginez qu’un collègue, un membre de votre famille ou un ami entendait quelqu’un parler de la santé mentale de façon respectueuse et qui la soutienne, elle serait plus à l’aise d’être ouvert et honnête. Tout commence véritablement par nous. Nous avons la capacité de créer l’espace pour une personne qui pourrait avoir des difficultés. Notre vocabulaire doit montrer que nous sommes un allié.
Comment pouvez-vous l’utiliser?
Quand il s’agit de parler de la maladie mentale ou du déclin du bien-être mental dans la vie de tous les jours, au lieu d’insister sur la condition de la personne, utilisez plutôt une alternative centrée sur la personne. En voici quelques exemples :
Stigmatisant | Respectueux |
Cette personne souffre de dépression. | Cette personne vit avec/connaît une dépression. |
Cette personne a commis un suicide. | Cette personne est morte de suicide. |
Cela me rend fou. | Cela m’ennuie/me frustre. |
Cette personne est/était un drogué. | Cette personne a un trouble lié à l’usage de substances ou cette personne est en rétablissement. |
Pour en savoir plus, consultez notre Guide de référence Le langage plus sûr : https://www.mhfa.ca/fr/langage-plus-sur-guide-de-reference
Dans les formations L’esprit au travail et Premiers soins en santé mentale, assurées par la Commission de la santé mentale du Canada, nous parlons de comment utiliser le vocabulaire centré sur la personne. Pauline Meunier, spécialiste de la formation et de la prestation pour L’esprit au travail, explique l’importance de cette partie de la formation :
À la fin de la formation, je demande souvent aux participants ce qui les a marqués, une chose qu’ils vont essayer ou dont ils se sont souvenus grâce à la formation. À de nombreuses reprises, les participants mentionnent la partie sur Le poids des mots. Je pense que c’est assez percutant parce qu’ils se rendent compte que d’utiliser du vocabulaire obsolète peut blesser et perpétuer les stéréotypes négatifs stigmatisants.
Pauline Meunier explique que pendant la formation, elle se concentre sur l’importance d’utiliser du vocabulaire approprié pour indiquer aux autres qu’ils peuvent lui faire confiance, que de lui parler est sûr. « On peut réduire la stigmatisation tout simplement en utilisant le vocabulaire approprié », explique-t-elle.
N’oubliez pas, l’un des plus grands obstacles à surmonter pour toute personne en proie avec un problème de santé mentale est la stigmatisation qui y est attachée. Tout le monde peut se faire le défenseur de la lutte contre la stigmatisation en faisant la promotion de l’utilisation de vocabulaire exact et respectueux. La fin de la stigmatisation commence quand vous agissez. Soyez conscient du vocabulaire obsolète utilisé dans les médias et autour de nous dans la vie de tous les jours. Soyez conscient des répercussions de votre vocabulaire. Ensemble, nous pouvons participer à mettre fin à la stigmatisation de la santé mentale.