Quand je me suis réveillée ce matin, mon nez coulait et je toussais. Est-ce le redoutable virus de la COVID-19? Le rhume? La souche grippale qui circule cette année? Des allergies?
J’ai donc pris un médicament en vente libre pour soigner la toux et le rhume (et peut-être une pilule contre les allergies, juste pour être certaine) afin de soulager mes symptômes.
Fort heureusement, mon test rapide de COVID-19 s’est révélé négatif. Je ne connaîtrai donc peut-être jamais la véritable cause de cette maladie. Tout ce que je peux faire, c’est traiter mes symptômes et prendre soin de moi du mieux que je peux. Je me repose beaucoup et je bois beaucoup de liquide. Je mange de la soupe au poulet, je bois du thé citronné, je prends des pastilles et je me frictionne la poitrine au besoin. Je m’isole et j’attends simplement que le mal passe.
Si mes symptômes s’aggravent ou si de nouveaux symptômes apparaissent, comme des difficultés respiratoires ou une forte fièvre, je devrai possiblement consulter un médecin. Mon médecin pourrait me prescrire quelques remèdes pour ces symptômes, comme de l’acétaminophène pour faire baisser la température ou une pompe pour ouvrir les voies respiratoires, et si mon état s’aggrave (espérons que non!), je pourrais me retrouver à l’hôpital, branché à un respirateur. Les médecins pourraient alors procéder à des tests approfondis pour trouver la cause des symptômes. S’agit-il d’un virus, comme pour la COVID-19 et la grippe, ou d’une bactérie? De l’asthme ou des allergies? S’ils parviennent à déterminer la cause, ils pourront traiter la maladie au lieu de se limiter à traiter mes symptômes.
La différence ici, entre traiter les symptômes et traiter la maladie véritable, n’est pas une question de sémantique. Il s’agit plutôt de la différence réelle entre le syndrome et la maladie.
Un syndrome est un ensemble de symptômes qui « se regroupent » (du grec : syn = ensemble et
drome = courir) sans cause évidente.
Une maladie a une cause reconnaissable qui entraîne des signes et des symptômes qui se manifestent cliniquement, comme la COVID-19 ou une allergie à la poussière.
La plupart des maladies mentales sont des syndromes, c’est-à-dire des ensembles de symptômes qui ont tendance à « se regrouper ». Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux(DSM-5), le guide officiel pour diagnostiquer des troubles mentaux, aide le clinicien à poser un diagnostic sur la base des syndromes répertoriés. Le diagnostic de mon trouble bipolaire de type II est basé sur un ensemble de symptômes avec lesquels je vis et qui, comme ma congestion nasale et ma toux, pourraient en réalité être causés par un grand nombre de maladies différentes. De ce fait, les traitements psychiatriques, comme mes médicaments et ma psychothérapie, sont prescrits pour traiter les symptômes que je présente, sur la base du DSM-5 et de l’expérience clinique de mon médecin des syndromes semblables au mien et survenus chez d’autres patients, ce qui peut contribuer à expliquer pourquoi nos traitements psychiatriques sont souvent inefficaces. Dans le cas de la dépression, par exemple, seul un tiers des patients retire des bienfaits de leur premier traitement. Je suis aux prises avec un épisode dépressif de mon trouble bipolaire de type II depuis près de deux ans maintenant, et j’ai essayé plusieurs traitements et approches thérapeutiques, sans toutefois parvenir à soulager mes symptômes. Tout comme un antibiotique ne soulagera pas mon nez qui coule ni ma toux si la maladie s’avère virale, les divers traitements que j’essaie pour soulager ma dépression bipolaire ne s’attaquent probablement pas à la maladie sous-jacente.
Je crois qu’il y a des états pathologiques concrets qui sous-tendent les syndromes psychiatriques. Avant que nous disposions de microscopes pour scruter les virus et les bactéries, chaque toux et chaque éternuement étaient considérés comme équivalents les uns aux autres. Je pense que des progrès médicaux et scientifiques considérables seront nécessaires pour déceler les états pathologiques qui sous-tendent les syndromes psychiatriques. Cependant, nous ne partons pas de rien. Par exemple, la recherche a permis de découvrir la bactérie responsable de la neurosyphilis et le repliement défectueux des protéines dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Des technologies d’imagerie optique du cerveau et même des tests sanguins sont en voie de perfectionnement. Nous sommes aujourd’hui plus près que jamais de comprendre les pathologies liées aux syndromes psychiatriques.
En attendant, le mieux que nous pouvons faire lorsque nous ressentons les symptômes désagréables de la maladie mentale est de prendre soin de nous du mieux que nous pouvons, de bien nous reposer et de consulter un médecin lorsque les symptômes s’aggravent ou que de nouveaux symptômes apparaissent. Nous devons continuer d’œuvrer pour une science de qualité et ne pas perdre espoir. Il est possible, voire probable, que les sciences médicales découvrent une nouvelle maladie psychiatrique qui permettra d’élucider le mystère entourant les causes et les traitements de ces pathologies qui causent tant de souffrances.
Mais, en attendant, ma soupe au poulet et mon thé citronné commencent à refroidir, et mon oreiller me réclame. Avez-vous des suggestions de bonnes séries que je pourrais regarder en rafale?