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Avez-vous déjà eu l’impression de ne pas savoir quoi dire ou faire lorsqu’un(e) ami(e) est aux prises avec un problème de santé mentale? Ou encore, pensez-vous connaître la solution à son problème avant même que cette personne ait fini d’en parler? Ne pas avoir toutes les réponses lorsque nous soutenons un(e) ami(e) aux prises avec un problème de santé mentale n’est pas forcément une mauvaise chose. Résistez à l’envie de tout régler. J’aborde la notion selon laquelle « soutenir n’est pas synonyme de réparer » dans mon article intitulé « C’est brisé – mais ne le réparez pas » rédigé pour Le Vecteur de la CSMC.
La résolution de problèmes
Cette personne merveilleuse et attentionnée qui n’aime pas voir les autres souffrir et se précipite pour tout régler rapidement, vous la connaissez? Il peut être difficile de voir une personne dont le bien-être mental est fragile. Résistez à l’envie de tout régler. Faites plutôt une pause pour écouter. En offrant un espace sécuritaire et en écoutant vraiment, et je dis bien VRAIMENT, vous contribuerez grandement à son rétablissement.
Évitez de vous approprier le problème et faites confiance à la personne pour y faire face à sa manière. Faites de votre mieux pour la comprendre, même si, de votre point de vue, ses propos ne sont pas toujours logiques. Laissez-lui suffisamment d’espace pour qu’elle découvre elle-même pourquoi elle se sent contrariée et suffisamment de temps pour réfléchir seule à ce qui lui convient le mieux. Retenez‑vous de lui prodiguer de « bons » conseils.
Le conseiller
La notion de « bon » conseil est relative : ce qui est bon pour moi ne l’est peut-être pas pour vous. Lorsque vous passez en mode « résolution de problème », la personne qui vous parle se rend compte qu’elle n’est pas écoutée attentivement et risque de se sentir ignorée et rejetée. En essayant de régler les détails (qui, quoi, quand, où), vous pourriez ne pas être conscient des sentiments ou des émotions qui se cachent derrière les mots.
Une récente étude répertorie 27 catégories d’émotions et explique comment elles se côtoient au quotidien. La plupart d’entre nous n’ont jamais appris à nommer ou à décrire leurs émotions. La psychologie supposait autrefois que la plupart des émotions humaines relevaient des catégories universelles que sont le bonheur, la tristesse, la colère, la surprise, la peur et le dégoût. Brene Brown anime une série télévisée éducative et centrée sur l’humain intitulée Atlas of the Heart qui explore en détail la notion des émotions, des sentiments et des mots utilisés pour les décrire.
En tant que psychothérapeute, vous pourriez supposer que j’ai une grande capacité d’écoute, mais ce n’est pas le cas! J’ai besoin de pratique. Je pense déjà à une réponse avant même que l’autre personne ait fini de parler, créant ainsi une rupture de la communication. Ou alors, s’il y a un moment de silence, je lance le mot auquel je crois qu’elle pense et, dans 90 % des cas, je me trompe complètement! Par conséquent, il est possible que l’autre personne se sente bousculée et se dise « Je dois me dépêcher ou je ne pourrai pas placer un mot », ou encore qu’elle commence à se fermer et à se désintéresser. Une véritable écoute crée un environnement dans lequel la personne peut véritablement se dévoiler, ayant de meilleures chances d’obtenir du soutien.
Posez des questions, mais ne dites rien
Pour soutenir sincèrement quelqu’un, adoptez une approche véritablement efficace en lui disant « aide‑moi à t’aider ». Mais comment s’y prendre? La première étape consiste à lui demander! Par exemple, posez des questions comme :
- « Comment puis-je te soutenir de la meilleure façon possible? »
- « Que penses-tu qu’il arriverait si tu faisais ceci ou cela? »
- « Comment puis-je te soutenir aujourd’hui? »
- « Qu’est-ce que la notion d’aide pour toi? »
Clarifier ce qui a été dit, en paraphrasant et en disant : « Ce que je t’ai entendu dire, c’est… » ou « Je comprends que… est-ce que c’est exact? »
Ne présumez pas de ce que la personne ressent ou de ce qu’elle « devrait » faire. Je dis souvent : « Ne laissez personne vous imposer aujourd’hui sa façon de penser, et ne vous imposez rien à vous-même ».
L’empathie
L’empathie ne consiste pas à se connecter à une expérience, mais plutôt aux émotions qui la sous‑tendent. La sympathie, c’est « ressentir pour soi » et peut sembler condescendante. L’empathie, c’est « ressentir avec l’autre ».
Pour faire preuve d’empathie, il convient de se mettre à la place des autres ou de voir le monde de leur point de vue. Évitez de porter des jugements afin de ne pas imposer aux autres vos croyances sur la façon dont les choses « devraient » être. Faites de votre mieux pour comprendre les sentiments de l’autre et communiquez votre compréhension de ses sentiments. Soyez conscient de vos propres sentiments et de vos limites.
L’usure d’écoute
Sachez qu’il peut être éprouvant d’écouter vraiment l’autre personne puisque l’écoute véritable demande de l’énergie. La situation pourrait susciter des émotions en vous ou raviver des souvenirs de vos expériences passées. Prendre soin de soi fait partie intégrante d’une écoute efficace. Certains diront qu’il s’agit d’un acte égoïste, surtout lorsque d’autres souffrent davantage. Soyons clairs : l’égoïsme désigne les gestes que vous posez au détriment des autres, alors que l’autogestion de votre santé indique une volonté de poser des gestes pour prendre soin de soi dans l’intérêt des autres (et de soi‑même). Cette distinction est d’une importance capitale.
Lorsque quelqu’un vous remercie de l’avoir écouté, acceptez ce gage de reconnaissance et dites-lui combien il est bon d’entendre que vous lui avez été utile. Cette reconnaissance permet également à l’autre personne de ne pas avoir l’impression de vous avoir accablé avec ses « problèmes ».
Lorsque vous écoutez et soutenez un(e) ami(e) qui éprouve un problème de santé mentale, exercez‑vous à le faire en tant que destinataire, et non comme critique, puis essayez de comprendre l’autre personne plutôt que de chercher à la convaincre ou à la changer.
« Le fait de se dévoiler entièrement à quelqu’un et d’être aimé malgré tout représente un cadeau de la vie qui tient presque du miracle. » [traduction] – Elizabeth Gilbert