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La caisse libre-service : un espace sûr

Par Michelle Murray

Il y a des années, alors que ma dépression était plutôt sévère, j’ai voulu simplifier certaines de mes courses hebdomadaires afin de réduire au minimum mes interactions humaines. J’entre, je sors, je rentre chez moi. C’était bien avant de tomber sur ma première caisse libre-service, à une époque où, comme tout le monde, peu importe comment je me sentais, je devais engager une conversation polie avec un pur inconnu. Dans les moments difficiles, ces interactions étaient souvent pour moi une source d’anxiété.

Lorsque je vais à l’épicerie avec mon père, il marmonne des commentaires désobligeants à propos de « ces machines-là », c’est-à-dire les caisses libre-service, et de leur caractère impersonnel. Il trouve insupportable cette voix robotique qui lui dit « Veuillez placer l’article dans la zone de mise en sac », et il se plaint de l’impact négatif de « ces machines-là » sur la main-d’œuvre.

Et il a raison. Ces machines ont un impact sur l’emploi. Mais pendant qu’il poursuit ses doléances sur leur impact déplorable pour les personnes qui cherchent du travail, je me réjouis silencieusement de leur existence. Je n’ai rien contre les travailleurs, bien au contraire. Mais « ces machines-là » rendent mon expérience à l’épicerie tolérable, surtout lorsque j’ai beaucoup de mal à surmonter ma dépression et que la surcharge sensorielle pousse mon TDAH à plein régime.

Lorsque je suis au plus bas, j’ai de la difficulté à soutenir une conversation, en particulier avec les commis, les serveurs et les baristas. Je ne veux pas être impolie, mais je n’ai jamais aimé échanger des banalités, même avec les gens que j’aime, et c’est presque douloureux de participer à ce genre de conversation avec des inconnus alors que je suis à peine capable de fonctionner. Les caisses libre-service me permettent d’entrer et de sortir rapidement d’un magasin, sans avoir à échanger des observations clichés sur la météo ou à livrer mes impressions sur un jour de la semaine en particulier alors que j’ai tout simplement envie de me blottir dans mon fauteuil en compagnie de mon chat pour écouter en rafale des épisodes de Veronica Mars.

Et lorsque j’explique la situation à mon père, il n’a pas l’air de comprendre. Pourtant, je suis sûre qu’il le voudrait bien. Je me trouve chanceuse de pouvoir parler à mon père de ma santé mentale et du fait que les maladies mentales peuvent avoir des effets très différents d’une personne à l’autre, mais il a encore de la difficulté à comprendre que pour moi, les caisses libre-service sont un moyen pratique de me procurer ce dont j’ai besoin. Et je comprends aussi son point de vue parce que les gens qui n’ont pas à vivre avec une maladie mentale ne voient pas les choses de la même façon que nous ou ne sont pas affectés par les routines « normales » de la vie quotidienne qui sapent souvent notre énergie.

Les magasins sont un endroit parfois stressant pour ceux d’entre nous qui vivent avec une maladie mentale. Imaginez-vous dans une pièce mesurant 10 pieds carrés, sous un éclairage aveuglant, et ajoutez-y de 10 à 15 autres personnes, un soupçon d’odeurs fortes et une cacophonie de cloches, de musique et de voix. Si vous arrivez à voir ce tableau, vous comprendrez peut-être pourquoi faire l’épicerie peut être une tâche un peu accablante pour une personne neurodivergente.

Voilà pourquoi j’ai modifié mon approche face à certaines de mes tâches quotidiennes comme l’épicerie. Je fais mes courses tôt (vraiment TÔT!) pour éviter la foule. Je sais ce dont j’ai besoin avant même d’entrer dans le magasin et j’évite ainsi de me sentir dépassée. Et je fais des caisses libre-service mon espace sûr. Voici d’autres conseils de magasinage.

  • Commandez votre épicerie ou vos provisions en ligne et faites-les livrer si possible.
  • Pour éviter les longues sorties, morcelez vos visites.
  • Préparez votre liste de magasinage en fonction de la disposition du magasin pour procéder dans le bon ordre et éviter de revenir sur vos pas.
  • Utilisez des bouchons d’oreille ou écoutez votre musique préférée pendant que vous faites vos courses.
  • Mangez un bonbon à la menthe lorsque vous ressentez du stress.
  • Donnez-vous la permission de quitter les lieux si les choses prennent un tour imprévu.
Michelle Murray
Michelle Murray

Au cours des 15 dernières années, la créatrice Michelle Murray a travaillé dans les secteurs du marketing, de la planification d’événements et de la collecte de fonds.

Elle se consacre avec passion à sensibiliser la population en matière de santé mentale et partage son histoire et son combat dans l’espoir de créer des espaces plus sûrs pour d’autres personnes vivant avec une maladie mentale.

Lorsqu’elle n’est pas en train de créer, Michelle poursuit une formation de 200 heures en vue d’obtenir son premier certificat de professeure de yoga, fait de la randonnée dans les sentiers locaux et s’adonne à la planche à pagaie pendant l’été. Elle est également membre bénévole du conseil d’administration de Centraide dans sa communauté et d’un organisme de services de rétablissement pour les personnes aux prises avec une dépendance.

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