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Le souvenir bien vivant d’un enfant mort-né

Même la vie la plus courte laisse des traces profondes. Krista Beneš rend hommage à une personne que le monde n’a jamais rencontrée, son second fils, Max. Le jour du Souvenir de la grossesse et de la perte d’un nourrisson a lieu chaque année, en octobre, et les ressources énumérées au bas de l’article sont disponibles toute l’année.
septembre 2025

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Tant de gens attendaient Max, mais seuls son père et moi avons pu le voir et le prendre dans nos bras. Sinon, Max n’a jamais existé. Ni pour son frère aîné, Henry, ni pour notre famille élargie et nos amis, et encore moins pour son petit frère, Simon, qui est venu plus tard. Pourtant, il avait bien existé. Max est né le 30 août 2014.

Il y a onze ans, Krista Beneš était une femme active, mère d’un enfant de deux ans en bonne santé. Elle menait une vie bien remplie. Sa seconde grossesse progressait exactement comme prévu jusqu’à ce que Krista remarque que le bébé bougeait moins.

Mon obstétricien-gynécologue a fait une échographie rapide. Nous avons vu le bébé bouger, ce qui m’a rassurée. Mais un peu plus tard cette semaine-là, quelque chose me tracassait encore. J’ai pris l’auto et je me suis rendue à l’Hôpital civique d’Ottawa pour en parler au médecin. Kris, mon mari, a proposé de m’accompagner, mais il travaillait alors que j’étais déjà en congé de maternité. Je lui ai dit que je l’appellerais dès que j’en saurais davantage.

Mais à l’échographie, nous n’entendions pas les battements cardiaques du bébé. Je suis tombée en état de choc. Comment tout ce que nous anticipions avec joie – un nouveau-né en bonne santé et toute la vie que nous aurions ensemble – pouvait-il nous être retiré aussi brutalement? Kris s’est précipité à mon chevet. On a provoqué mon accouchement et j’ai accouché en écoutant naître d’autres bébés, sachant que je n’entendrai jamais le premier cri de Max. L’accouchement a duré deux jours.

Nous avions passé des semaines à préparer la chambre de Max, à peindre un mur en bleu marine et en blanc, à choisir la décoration pour en faire un lieu accueillant et chaleureux. Tout était prêt pour l’accueillir à la maison. Mais Max est né sans vie, à 38 semaines.

Kris et moi l’avons tenu dans nos bras pendant ce qui nous a semblé n’être que quelques instants fugaces. L’hôpital avait collé un papillon sur la porte de notre chambre pour signaler ce qui s’était passé.  Une photographe bénévole est venue nous voir. Comment pouvait-on songer à prendre des photos de mon bébé mort, me suis-je dit, stupéfaite. Mais maintenant, je chéris ces précieux portraits. Max était aimé. Il l’est toujours.

Les grands frères de Max, Simon et Henry, rendent hommage à Max.

Tout allait si vite. Nous planifiions l’arrivée d’un nouveau-né, et subitement, nous étions en train d’organiser ses funérailles. Kris et moi n’avions jamais réfléchi à l’endroit où nous voulions être enterrés. Mais là, il nous fallait décider pour Max. Nos croyances spirituelles ont été mises à rude épreuve, de manière incroyablement immédiate. Tout ce dont j’étais certaine, c’est que je ne pouvais pas laisser mon bébé tout seul.

Nous avons trouvé une place aux côtés des arrière-grands-parents de Max, dans un cimetière situé non loin de l’endroit où j’ai grandi. C’est un lieu familier, pas très loin de la maison. Avec le soutien de notre famille et de nos amis, nous avons réussi à surmonter cette épreuve. Pendant des semaines et des semaines, on nous a apporté des repas et des fleurs, on nous a offert des services de ménage, des tas de pensées positives et de vœux chaleureux.

Un réseau de soutien

Ma priorité était de guérir physiquement et de prendre soin de Henry. Pendant qu’il était à la garderie, je pleurais et je dormais. Quand il était à la maison, je me motivais pour jouer avec lui. Je ne voulais pas que sa maman soit complètement submergée par le chagrin et entourée d’un nuage noir.

Au bout d’environ six semaines, un groupe de soutien aux personnes endeuillées a été créé par le centre Roger Neilson House (aujourd’hui appelée Roger Neilson soins palliatifs pour enfants). Kris et moi nous y sommes inscrits ensemble. C’est là que nous avons appris qu’il était tout à fait sain de montrer des photos de Max et de parler de lui. Max pouvait faire partie de notre famille et de notre quotidien. Il était important de le comprendre.

Carol Openshaw, qui a co-animé le groupe de parents endeuillés, a remarqué que les familles dont les enfants étaient morts en bas âge ne revenaient parfois pas après la première séance. Elle s’est alors dit que ces parents – qui n’ont jamais eu l’occasion de connaître leur enfant – avaient peut-être de la difficulté à s’identifier à des parents qui, pendant des années, avaient vu grandir le leur. Le deuil non reconnu est une source incroyable de repli sur soi. Carol a donc lancé un programme de soutien par les pairs qui consiste à jumeler des personnes ayant vécu des choses semblables. C’est ainsi que j’ai rencontré Julia Winslow. Son fils, Carter, est venu au monde mort-né à 38 semaines, comme Max.

Vous ne pouvez pas imaginer combien il est réconfortant de pouvoir envoyer un texto disant « Je viens juste de passer devant le rayon des couches et maintenant je pleure » en sachant que le destinataire comprendra exactement ce que vous ressentez. Ça change tout. Encore aujourd’hui, Julia reste une pierre angulaire dans ma vie.

Quand Julia a quitté l’hôpital après la mortinaissance de Carter, on lui a remis une brochure sur la prévention du suicide. C’est tout. Le dépliant corroborait le fait qu’il est extrêmement douloureux de perdre un enfant. Mais il ne répondait en rien à ses besoins. Depuis 10 ans, Julia contribue à réduire cette pénurie de ressources. Elle travaille en effet auprès de ButterflyRun (la course Papillon), qui a pour mission de soutenir les familles d’Ottawa ayant vécu une perte pendant la grossesse ou les personnes qui souffrent d’infertilité. Ce mouvement a aidé des milliers de personnes, et la course Papillon s’est répandue ailleurs au Canada, notamment à Vancouver, Kelowna, Nanaimo et Whistler.

Grâce à ces efforts et à bien d’autres, un large éventail de ressources sont maintenant mises à la disposition des familles partout au Canada. Auparavant, la stigmatisation liée au deuil d’un enfant poussait les gens à se cacher. Maintenant, les gens se rassemblent pour trouver un apaisement et du réconfort.

Krista Beneš partage ses expériences personnelles pour aider les autres. Elle a récemment fait un virage professionnel important. En tant que responsable du dépistage prénatal au Registre et réseau des bons résultats dès la naissance (BORN) Ontario.

Précieux souvenirs

Quand, plus tard, je suis tombée enceinte de Simon, j’ai naturellement eu des inquiétudes. Outre les préoccupations d’ordre physique, je me demandais sans cesse si tout le monde allait oublier Max.

Un geste d’Henry m’a apaisée. Pour la première fois, il participait à la course Terry Fox, organisée chaque année à son école. Chaque élève était alors invité à dédier sa course à quelqu’un. La dédicace d’Henry disait ceci : « Terry a couru pour moi; moi, je cours pour Max ». J’étais si fière. La dédicace d’Henry prouvait que nous faisions sûrement quelque chose de bien en montrant à nos fils qu’ils ont le droit de se souvenir de leur frère.

D’autres se souviennent aussi de Max. Des proches me téléphonent ou m’envoient un message texte le jour de son anniversaire. C’est important. Je ne dis pas que tout le monde doit le faire, mais le fait que d’autres se souviennent encore me réconforte.

Chaque année, notre amour pour Max s’approfondit et son importance ne faiblit jamais au sein de notre famille. Au début de l’année, j’ai vu une offre d’emploi qui disait : « L’amélioration de la santé des femmes enceintes et de leurs bébés vous tient à cœur? »

J’ai ressenti un appel. Je travaillais à la Commission de la santé mentale du Canada depuis neuf ans et j’adorais mon travail, mais qui était le plus susceptible d’aider à comprendre comment on pouvait s’y prendre pour remplir cette mission qu’une personne ayant connu l’issue la plus terrible de toutes?

Maintenant, après avoir fait un important virage professionnel, je suis entourée d’une équipe incroyable, composée de personnes brillantes et passionnées qui travaillent toutes vers un but commun : que les débuts de la vie se déroulent sous les meilleurs hospices pour bénéficier d’une bonne santé tout au long de la vie. Quelle belle façon d’honorer l’héritage de Max.

Comme le disait Jessica Waite, auteure à succès et essayiste primée, qui écrit fréquemment sur le deuil – et l’espoir.

Ressources:

  • Au Pregnancy and Infant Loss Support Centre (Centre de soutien aux parents ayant perdu un enfant pendant la grossesse ou en bas âge), l’équipe de praticiens est composée de parents endeuillés dont le vécu personnel les a amenés à exercer des activités de counseling et d’encadrement.
    • Aditi Lovering, fondatrice de ce centre, explique que leur intention est d’aller à la rencontre des gens là où ils en sont : peu importe le temps écoulé depuis la perte, peu importe le stade de la grossesse, peu importe si la personne endeuillée n’est pas le parent qui a conçu l’enfant. Le Centre offre un soutien par les pairs, un soutien professionnel, des boîtes de réconfort et des ressources en ligne.
  • Lesley Sabourin affirme que Roger Neilson Children’s Hospice reconnaît également que les grands-parents, les frères et sœurs et les membres de la famille élargie peuvent aussi avoir besoin d’un accompagnement pour faire leur deuil. Ils ont multiplié leurs services pour répondre à ces besoins et adressent de nombreux Ontariens au Réseau pour la grossesse et la perte infantile.
  • Pour les parents endeuillés qui tentent encore de bâtir leur famille, Roger Neilson Children’s Hospice offre un programme appelé Soutien après la grossesse et recommande org pour les personnes qui n’ont pas directement accès au programme.
  • De la Commission : Un guide pour s’orienter dans les services publics et privés de santé mentale au Canada.

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