J’ai reçu un diagnostic de trouble bipolaire de type 2, exacerbé par une dépression post-partum, peu après la naissance de mon fils. Lorsque mon psychiatre m’a dit pour la première fois que j’étais diagnostiquée bipolaire, je ne voulais pas le croire. J’avais des idées préconçues selon lesquelles les personnes vivant avec des troubles bipolaires étaient effrayantes, instables, hyperactives, avaient une double personnalité et n’étaient pas en mesure de se comporter correctement en société. Comment pouvais-je être diagnostiquée avec un tel trouble? Je ne trouvais pas logique qu’une compagne, une mère et une enseignante comme moi puisse recevoir un diagnostic de trouble bipolaire. Mes propres préjugés entourant la maladie mentale et le trouble bipolaire m’ont empêchée d’accepter mon diagnostic. J’avais honte de ce trouble. Je voulais le cacher aux autres comme je l’avais caché pendant toutes ces années.
Accepter mon diagnostic
Il m’a fallu un certain temps pour vraiment comprendre et accepter mon diagnostic. Des mois de thérapie avec un conseiller et avec mon psychiatre, en plus de la prise des médicaments prescrits, m’ont permis de me rendre compte que je vivais en effet avec une bipolarité non diagnostiquée depuis longtemps. Je vivais avec ce trouble en portant un masque devant mes interlocuteurs. J’ai finalement décidé d’ôter ce masque lorsque mon fils avait environ 5 mois. J’en avais assez de cacher qui j’étais et je voulais faire part de mon histoire à mes amis et à ma famille. En racontant mon histoire, je souhaitais aider d’autres personnes aux prises avec des maladies mentales à savoir qu’elles ne sont pas seules. Pendant des mois, j’ai traîné les pieds pour raconter mon histoire. Je m’inquiétais de ce que les gens allaient penser de moi et s’ils allaient m’accepter après avoir découvert que je vivais avec un trouble bipolaire. Il s’agit de l’enjeu même de la stigmatisation. Le fait de m’inquiéter de ce que les autres penseraient de moi et de cacher mon histoire contribuait à la stigmatisation entourant la maladie mentale.
En général, parler de la santé mentale ne fait pas partie de notre quotidien. Mais que se passerait-il si cela n’était pas le cas? Et si nous pouvions divulguer que nous avons une maladie mentale sans nous en inquiéter? Et si c’était aussi simple que de dire ce que vous aviez pris au petit-déjeuner ce matin-là? La maladie mentale n’est pas quelque chose qu’une personne choisit. Juste après avoir écrit sur mon expérience à propos de mon diagnostic, j’ai décidé de devenir une militante pour la santé mentale dès que j’en aurai l’occasion. Je ne voulais plus garder le silence sur mon diagnostic, car je portais un masque depuis déjà trop longtemps. J’ai commencé à écrire à différents éditeurs et à parler à mes amis et à ma famille dès que j’en avais l’occasion.
Briser le silence
Les préjugés sont encore très présents dans notre société. Mais nous pouvons commencer à briser la stigmatisation en abordant de plus en plus le sujet de la santé mentale. Je me souviens avoir fait partie d’un groupe de mamans de bébés que j’ai fréquenté pendant plusieurs mois. L’animatrice du groupe commençait toujours chaque séance par une question légère pour briser la glace, en nous demandant quel était notre film préféré ou quelle serait la destination de notre prochain voyage. Les mamans et moi avons toujours répondu de manière superficielle à ces questions. Un jour, l’animatrice nous avait demandé de raconter au groupe une chose que personne n’aurait jamais devinée à notre sujet. C’était pour moi l’occasion de briser la stigmatisation et de parler de ma bipolarité. J’ai remué cette idée dans tous les sens pendant que d’autres mamans partageaient leurs réponses très banales et prévisibles. Enfin, lorsque mon tour était venu, j’ai dit nerveusement « quelque chose que vous ne devineriez jamais de moi est que je vis avec un trouble bipolaire ». En balayant du regard l’ensemble de l’assistance, je me suis aperçue que personne ne disait rien ni ne me regardait dans les yeux. C’était quelque chose que personne ne s’attendait à entendre. L’animatrice m’a remerciée d’avoir été assez courageuse de partager cela avec le groupe, et m’a dit qu’il était nécessaire que davantage de personnes en fassent autant. En faisant connaître notre parcours aux autres, nous pouvons contribuer à réduire la stigmatisation.
La santé mentale ne doit pas être considérée comme la boîte de Pandore. Je suis fière de ce que j’ai accompli malgré mon diagnostic de bipolarité. Ce diagnostic n’est pas banal et il est impressionnant de pouvoir mener une vie réussie tout en étant confronté à une maladie souvent invalidante. Après avoir passé un certain temps sur les plateformes des médias sociaux, j’ai constaté que des personnes fortes racontaient leurs histoires. La stigmatisation entourant les problèmes de santé mentale diminue grâce à des personnes assez courageuses qui en parlent et qui racontent leurs histoires. Elles ne le font pas pour attirer l’attention, mais pour créer des liens. Lorsque nous établissons des liens avec des personnes qui connaissent notre maladie mentale, cela nous donne de l’espoir. Il s’agit de cet espoir de pouvoir survivre et vivre avec notre maladie mentale au quotidien. Notre maladie mentale ne devrait pas nous définir. Alors, si vous hésitez encore à partager votre récit, juste faites-le, vous serez heureux de l’avoir fait. Échanger avec ne serait-ce qu’une seule personne qui vit la même chose que vous peut faire toute la différence et constitue un pas de plus pour aider à réduire la stigmatisation.
Jamie Rose est enseignante depuis plusieurs années dans une école primaire. Elle est aussi mère d’un magnifique garçon d’un an. À la naissance de son fils, elle a été hospitalisée, et plus tard, on lui a diagnostiqué un trouble bipolaire, exacerbé par une dépression post-partum. Jamie promet de militer pour la sensibilisation à la santé mentale et de continuer à lutter contre la stigmatisation. Jamie passe son temps libre à jouer au volley-ball, à promener son chien et à écouter du rock des années 90.