Le moins qu’on puisse dire, c’est que je n’étais pas adéquatement préparée pour entreprendre mes études postsecondaires. Mon intelligence et mes capacités scolaires étaient à la hauteur. C’est plutôt ma santé mentale et le soutien disponible qui faisaient défaut. Pourtant, envers et contre tout, j’ai décroché mon diplôme. Comment y suis-je parvenue? À force de courage et de détermination.
Nous étions plusieurs à livrer le même combat. Dans mon cercle d’amis, presque tout le monde avait vécu ou connaissait quelqu’un qui avait vécu des problèmes d’anxiété, de dépression, de consommation de substances ou d’alimentation. C’était tellement fréquent que ça allait de soi ou presque. Je sentais le poids et la douleur de la stigmatisation sans même connaître ce mot.
En plus, il n’est pas toujours évident de reconnaître qu’on a besoin d’aide. Les gens doivent pouvoir demander de l’aide à leurs propres conditions, lorsqu’ils s’y sentent prêts. Dans mon cas, trouver des services de santé mentale sécuritaires, inclusifs et exempts de jugement sur le campus semblait presque mission impossible. J’ai réussi à achever le programme, mais je sais que certains de mes pairs ont dû déclarer forfait.
Il faut signaler que tous les étudiants n’entreprennent pas leur parcours postsecondaire sur un pied d’égalité. À l’époque, beaucoup d’étudiants autour de moi vivaient dans une pauvreté criante. Je faisais partie des nombreux étudiants dont les résultats souffraient parce que je devais travailler pour assurer ma survie.
Aux études, l’enjeu est de taille. Qui peut se permettre d’échouer, puis d’avoir toutes les misères du monde à trouver assez d’argent pour reprendre un semestre? Les étudiants ressentent la pression écrasante de devoir réussir dans un système hautement compétitif. Ainsi, l’importance capitale accordée à la réussite scolaire forme un obstacle supplémentaire qui dissuade les étudiants de demander de l’aide.
Trop longtemps, les seules options qui s’offraient aux étudiants étaient de répondre aux attentes d’un rendement scolaire normal, d’échouer sur toute la ligne ou de demander certaines mesures d’adaptation. Ceux qui optaient pour cette solution pouvaient se sentir diminués ou invalidés par rapport aux autres.
À certains égards, les choses ont évolué. On assiste actuellement à un changement dans les attitudes sociétales face à la maladie mentale et à une prise de conscience du nombre de personnes touchées. On nous répète souvent qu’une personne sur cinq au Canada éprouvera une maladie ou un problème en lien avec la santé mentale au cours d’une année donnée, en soulignant qu’il est normal de ne pas toujours bien aller.
En dépit d’améliorations notables, les étudiants du postsecondaire demeurent aux prises avec des problèmes de santé mentale. La recherche montre que trois fois sur quatre, les problèmes de santé mentale apparaissent avant l’âge de 24 ans, une période où de nombreuses personnes font ou achèvent leurs études postsecondaires. En outre, dans une étude réalisée en mai 2020, l’Alliance canadienne des associations étudiantes a découvert que plus de 70 % des étudiants se sentent stressés, anxieux ou isolés en raison de la pandémie, et que 80 % d’entre eux s’inquiètent de leur avenir après la pandémie.
Il est encourageant de constater que malgré la pandémie — ou peut-être à cause de celle-ci — de nombreux étudiants prennent la parole publiquement, trouvent des solutions pour eux-mêmes et pour leurs pairs et s’entraident.
Mais les étudiants ne sont pas seuls dans la lutte contre la maladie mentale. Des établissements postsecondaires d’un bout à l’autre du pays ont mis en place des initiatives pour favoriser la santé mentale de leurs étudiants. La Norme nationale du Canada sur la santé mentale et le bien-être des étudiants du postsecondaire, créée par la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC), aide les établissements d’enseignement à mieux soutenir leurs étudiants et à faire une place à la santé mentale dans leurs services et leurs systèmes. Les publics concernés sont invités à consulter la trousse de départ pour en apprendre davantage et entreprendre le processus d’adoption de la Norme.
Pour en apprendre plus sur les moyens de soutenir la santé mentale des étudiants, je vous invite à découvrir L’esprit curieux, un programme de formation fondé sur des données probantes que la CSMC a conçu pour promouvoir la santé mentale et réduire la stigmatisation associée à la maladie mentale dans les établissements d’enseignement.
Il reste encore beaucoup à faire, mais quand je repense à tout le chemin qui a été parcouru, je reprends espoir pour les prochaines générations d’étudiants.