Ottawa – le 10 octobre 2025
En tant que personne ayant travaillé dans des pays touchés par des conflits et des crises humanitaires, j’ai réalisé que le déplacement physique ne représente qu’une partie de l’histoire. Le fardeau mental et émotionnel représente l’autre facette de cette expérience et perdure souvent bien plus longtemps.
Cette Journée mondiale de la santé mentale met l’accent sur la santé mentale en situation d’urgence humanitaire. Elle nous appelle à prendre conscience non seulement de l’ampleur du défi, mais aussi du pouvoir d’action des communautés lorsqu’elles prennent les choses en main.
Il n’existe pas de solution unique aux conséquences des crises humanitaires sur la santé mentale. Mais ce que j’ai constaté, tant à l’international qu’ici sur l’île de la Tortue, c’est que le soutien le plus précieux provient bien souvent des communautés directement touchées.
Qu’il s’agisse de personnes réfugiées organisant des cercles de guérison dans les camps de personnes déplacées, de voisines et voisins prenant des nouvelles les uns des autres après un incendie de forêt, ou de bénévoles formés au soutien par les pairs — ces gestes de solidarité ne sont pas seulement utiles. Ils sont essentiels. Ils sauvent des vies.
Aujourd’hui, le monde pèse lourd sur nos épaules. L’écoanxiété, qui ne cesse de gagner du terrain, s’ajoute aux crises croissantes de famine, de guerre et de déplacements forcés, rendant l’espoir difficile à percevoir. Les chiffres sont accablants : 123 millions de personnes contraintes de fuir leur foyer à travers le monde. Face à une telle réalité, il est facile de se sentir submergé.
Mais j’ai aussi constaté ce qui se passe lorsque nous partageons ce poids en nous soutenant mutuellement. C’est particulièrement vrai pour les travailleurs humanitaires, confrontés à un nombre inédit de conflits et d’urgences, tant sur le plan local qu’à l’échelle mondiale.
Comme le rappelle l’Organisation mondiale de la Santé, « les travailleurs humanitaires sont soumis à un stress extrême et sont souvent directement touchés par les crises auxquelles ils répondent. »
En tant que membre de cette communauté, je sais que maintenir une réponse humanitaire efficace passe par la prise en compte des besoins de celles et ceux qui apportent réconfort et soutien, que ce soit grâce au soutien entre pairs ou aux programmes de santé en milieu de travail, ou aux Premiers soins en santé mentale.
Ici, chez nous, des programmes comme L’Esprit au travail – Premiers intervenants contribuent à instaurer une culture du soin pour les personnes à qui nous faisons appel en temps de crise.
La façon dont nous guérissons — que ce soit en tant que personnes intervenantes, aidantes, bénévoles ou déplacées — passe par la communauté. Cela se manifeste dans les gestes du quotidien par lesquels nous prenons soin les uns des autres : écouter, sans juger. Offrir de l’espace à la peine, à la peur. Et surtout, se rappeler que demander de l’aide, ce n’est pas un signe de faiblesse — c’est un véritable acte de courage.
En cette Journée mondiale de la santé mentale, trouvons tous le courage de nous soutenir les uns les autres.
Lili-Anna Pereša C.Q.
Présidente – directrice générale
Commission de la santé mentale du Canada