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Le VecteurConversations sur la santé mentale

Vous avez un éclair de génie?

Le programme d’application des connaissances SPARK guide ceux et celles qui désirent améliorer la recherche et la pratique en matière de santé mentale, d’usage de substances ou de dépendances. Nous vous présentons un coup d’œil sur le projet Grand Council Treaty #3, qui a été une bouée de sauvetage pour 28 communautés touchées par des enjeux de santé mentale.

Dès les premiers jours de la pandémie de COVID-19, Darlene Curci prenait note des difficultés rencontrées à Kenora, à Fort Frances et à Dryden. Elle est coordonnatrice des systèmes autochtones pour le projet Grand Council Treaty #3 qui regroupe 28 communautés des Premières Nations sur plus de 142 000 km² dans le nord-ouest de l’Ontario et le sud-est du Manitoba.

« Il s’est passé beaucoup de choses sur le terrain pendant le confinement, se souvient-elle. Notre équipe de professionnels de la santé a été déployée pour aider les communautés à traverser la pandémie en leur fournissant diverses ressources. »

Dans le cadre de son travail, Darlene a pu observer l’évolution des besoins, ainsi que les difficultés des communautés à faire face à la pandémie. « Certaines communautés sont isolées et disposent de peu de ressources, lesquelles doivent ensuite être partagées sur une vaste étendue géographique », explique-t-elle. « Nous ne disposons pas de ressources spécialisées pour traiter les problèmes de santé mentale ou de dépendances. Les psychiatres sont contraints de faire le trajet en avion depuis Toronto, ou alors les gens doivent se rendre à Winnipeg pour obtenir des services spécialisés. »

Ces services sont certes ancrés dans la pratique clinique, mais il existe dans les communautés visées par le Traité no 3 des approches traditionnelles, d’autres axées sur le territoire, ou une combinaison des deux, qui incluent des modèles occidentaux de santé et de bien-être. Alors que Darlene  cherchait un moyen d’établir un lien entre ces approches et les communautés visées par le Traité no 3, elle a remarqué un article dans les médias sociaux sur le programme  de la Commission de la santé mentale du Canada. Après avoir constaté le gage de réussite qu’est le programme SPARK, lequel comprend 16 heures de formation en atelier et un an de mentorat complémentaire, elle s’y est inscrite pour donner vie à son idée.

Combler les lacunes
Le programme d’application des connaissances SPARK vise à fournir les outils et les ressources nécessaires pour établir un lien entre ce que nous savons et ce que nous faisons dans les secteurs de la santé mentale et du traitement de l’usage de substances. Il donne aux personnes qui ont une idée en tête – un éclair de génie – les moyens de favoriser des changements positifs au sein de leur communauté. Comme le montrent les études, ce processus prend souvent plusieurs années. Cependant, le cadre de travail De l’innovation à l’application (I-A) du programme SPARK peut réduire considérablement ce délai.

Parmi les plus récents diplômés du programme (appelés SPARKies), citons le Collectif des écrivains du Canada, un organisme de bienfaisance qui organise des ateliers pour les groupes sous‑représentés de la société. L’organisme s’est associé à des organisations d’anciens combattants pour offrir des ateliers d’écriture expressive en guise d’intervention de santé non clinique. Un autre organisme caritatif, Body Brave, a également travaillé avec le programme SPARK en vue de remédier aux lacunes des services offerts aux personnes qui recherchent du soutien face à des troubles de l’alimentation.

Le programme SPARK invite les participants à réfléchir à un problème qu’ils souhaitent résoudre et leur propose un accompagnement et du mentorat tout au long des sept étapes du programme I-A :

  1. détermination de l’objectif;
  2. sélection d’une innovation;
  3. précisions sur les acteurs et les pratiques;
  4. détermination des agents de changement;
  5. conception du plan d’application des connaissances;
  6. mise en œuvre;
  7. évaluation.

Pour Darlene, « l’exercice confère une rigueur qui aiguise l’esprit, tout en permettant un équilibre entre l’agilité et l’adaptabilité en travaillant avec différentes communautés, spécialités et expertises et en communiquant de diverses façons. Lors du processus de demande, j’ai dû rédiger mon intention, ce qui m’a aidé à me concentrer sur la direction que je voulais donner à mon idée. »

Dans le cadre du programme, elle a conçu un outil essentiel, le guide de survie en santé mentale du Grand Council Treaty #3, qui sert maintenant de bouée de sauvetage en santé mentale à l’ensemble des communautés des Premières Nations.

Spark session

Séance de planification SPARK organisée en février 2020.

« C’était tout un défi d’offrir une grande valeur à la communauté en analysant un important volume d’informations et en les transmettant de manière à ce qu’elles leur soient utiles, a-t-elle déclaré. Au final, ce processus m’a aidé à renouer avec les gens d’une manière moins intrusive et plus stimulante. »

Le guide d’une cinquantaine de pages comprend des conseils pratiques sur la façon de réagir en cas de crise, des lignes directrices pour interagir avec les Aînés, des listes pratiques de numéros de téléphone à afficher sur le frigo, des pages à colorier, des feuilles de travail pour surmonter les périodes de stress, ainsi que des conseils adaptés pour interagir avec les gens en tenant compte de leur situation. Par exemple, une section consacrée aux jeunes aborde la question des limites à ne pas dépasser, offre des conseils sur l’expression créative favorisant le bien-être, et présente des exemples de relations saines.

Le guide est fondé sur le concept thérapeutique Ga-nan-da-wis (bonne santé) issu des approches de guérison traditionnelles et culturelles qui visent à atteindre l’équilibre émotionnel et mental, tant sur le plan culturel que spirituel. On y trouve également des conseils de santé mentale pour les parents, des suggestions d’activités pour les Aînés, comme se promener ou faire de l’exercice en compagnie de personnes de son entourage, ainsi que des pistes de réflexion pour les personnes qui doivent composer avec les effets cumulatifs et collectifs des traumatismes antérieurs (ou intergénérationnels). L’usage de substances, les dépendances, la violence familiale et la prévention du suicide, de même que l’isolement, la solitude et la quête d’équilibre dans l’utilisation de la technologie, sont autant de sujets abordés.

Le projet de Darlene s’inscrit dans le prolongement de la stratégie Minobimaadziwin (citée ci-dessous) élaborée par des organisations du Traité no 3, des Aînés et des membres de la communauté, et a été lancé comme cadre d’orientation en décembre 2019. Ses 13 valeurs constituent un fil conducteur reliant le savoir autochtone, le bien-être, ainsi que les réalités actuelles liées à la COVID-19.

Stratégie Minobimaadziwin du Grand Council Treaty #3

  1. Approche unifiée
  2. Mobilisation des Aînés
  3. Promotion du mode de vie culturel
  4. Promotion de l’anishinaabemowin comme mécanisme de guérison
  5. Établissement de partenariats et de réseaux
  6. Résolution des causes profondes des problèmes de santé mentale
  7. Renforcement des capacités communautaires
  8. Accent sur l’éducation et la prévention
  9. Formation et outils adaptés au Traité no3 (promotion de l’éducation et sensibilisation aux pratiques de prévention de la COVID-19)
  10. Prestation de services sécuritaires sur le plan culturel
  11. Guérison ancrée dans les connaissances traditionnelles et approche axée sur le territoire
  12. Respect des relations et des droits issus des traités
  13. Chaque porte est la bonne porte

Ces principes directeurs s’appuient sur les traditions issues du Traité no 3. « Nous sommes très forts et très axés sur nos modes de vie traditionnels, » a déclaré Darlene. « Nous avons élaboré notre propre loi en matière de soins aux enfants, de santé et de ressources naturelles, Manito Aki Inakonigaawin, la structure qui régit notre façon de faire les choses. »

Sa trousse d’outils servant de guide de survie a été lancée pendant la Semaine de la santé mentale en mai 2021. Après la réception par les 28 communautés d’une première boîte de guides, une demande accrue a mené à une réimpression subséquente de 2 000 autres exemplaires. Les gens apprécient beaucoup son contenu et utilisent souvent ses diverses ressources pour répondre à leurs besoins particuliers. Ils détachent des pages pour les afficher près de leur bureau ou prennent des photos des sujets qui les aident le plus dans les périodes difficiles.

« Dans les moments de détresse, lorsque les problèmes semblent insurmontables, cette méthode permet de faire le point sur sa propre situation », a indiqué Darlene. En plus d’avoir créé le guide, elle utilise elle-même les outils. « C’est relaxant », dit-elle en faisant référence aux pages à colorier, ainsi qu’aux activités comme « 10 minutes pour réfléchir à sa journée (et renforcer son estime de soi) » ou encore « Mes humeurs ».

Les travailleurs sociaux apprécient également les conseils rapides pour aider les personnes aux prises avec des pensées suicidaires en discutant des facteurs de risque et de protection et en offrant des services de consultation téléphonique, en plus de conseils traditionnels sur le deuil et la perte. L’avant‑propos du guide, rédigé par le Grand Chef, souligne le caractère unique des besoins de chacun en matière de santé mentale. Plutôt que de mettre de l’avant des clichés bien intentionnés ou des descriptions simplistes, son message porte sur l’importance de demander de l’aide en cas de besoin « puisqu’il y a toujours une lueur d’espoir pour des jours nouveaux et meilleurs ».

Pour en savoir plus sur le projet Grand Council Treaty #

Auteure:
Les points de vue et les opinions exprimés dans cet article appartiennent uniquement à l’auteur(e) et ne représentent pas nécessairement les politiques officielles de la Commission de la santé mentale du Canada.

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