Si vous êtes en état de détresse, veuillez appeler ou texter le 988 n’importe quand. En cas d’urgence, appelez le 9-1-1 ou rendez-vous à votre service d’urgence local.

Le VecteurConversations sur la santé mentale

C’est une histoire à raconter n’importe quel jour de l’année, mais nous souhaitons attirer l’attention sur le thème de la Journée internationale de sensibilisation aux surdoses 2024, qui a lieu chaque année le 31 août, et qui est « Ensemble, nous pouvons ». Le thème souligne le pouvoir des collectivités qui s’unissent pour mettre fin aux surdoses.

J’ai une trousse qui permet de contrer une surdose d’opioïdes, et je n’en ai pas honte.

Il n’y a pas que ceux vivant avec des problèmes d’usage de substances qui pourraient avoir la vie sauve grâce à la naloxone; il y a aussi ceux qui vivent avec des douleurs chroniques et qui prennent des analgésiques sur ordonnance – comme ma femme. Ou des personnes comme mon fils, qui pourraient prendre ces analgésiques par accident. Chacun de nous, dans la vie de tous les jours, peut tomber sur quelqu’un qui, pour une raison ou une autre, a fait une surdose d’opioïdes.

Cela peut arriver n’importe où, même au travail.

Selon Santé Ontario, en 2021, 2129 cas d’intoxication liée aux opioïdes ont été recensés chez 1,7 million de travailleurs de l’Ontario. Les ouvriers, les professionnels du secteur des services, les professionnels de la santé et les employés de bureau – tous les travailleurs –, ainsi que les clients et les entrepreneurs qui entrent dans les entreprises peuvent être touchés. Avec une telle portée, il apparaît logique d’inclure une trousse de naloxone dans la trousse de secours sur le lieu de travail.

« Pour moi, c’est une évidence », déclare Stephanie Fizzard, ancienne intervenante en réduction des méfaits. « Quand vous attrapez votre trousse de secours, vous attrapez votre défibrillateur, vous voulez avoir tout ce dont vous avez besoin pour faire face à cette situation. »

L’intégration de la naloxone dans les trousses de secours en milieu de travail devrait être la norme – de même que la formation sur son administration.

À propos des opioïdes

Les opioïdes comme le fentanyl, l’oxycodone, l’héroïne et la morphine sont des médicaments aux propriétés analgésiques pouvant provoquer une euphorie et présentant un risque élevé d’accoutumance. Ils peuvent être délivrés sur ordonnance, mais peuvent aussi être obtenus ou produits illégalement. Selon le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, la crise des opioïdes est alimentée par les opioïdes synthétiques. Le fentanyl et les substances apparentées d’origine non pharmaceutique et fabriquées illégalement sont les opioïdes les plus largement disponibles sur le marché illicite non réglementé au Canada. Ces substances accroissent considérablement le risque de décès par intoxication, car elles sont très puissantes et potentiellement mortelles, même en petites quantités. Souvent, des catégories non apparentées de drogues fabriquées illégalement contiennent du fentanyl dans le but d’augmenter le risque d’accoutumance, ce qui entraîne des surdoses d’opioïdes même chez des personnes qui n’en ont pas fait usage de façon intentionnelle.

À quoi peut ressembler une surdose

Les opioïdes peuvent provoquer une surdose, dont les symptômes peuvent se manifester par des difficultés à marcher, à parler ou à rester éveillé. Les symptômes peuvent aussi apparaître sous les formes suivantes :

  • Lèvres ou ongles bleus ou gris
  • Pupilles très petites
  • Peau froide et moite
  • Étourdissements et confusion
  • Somnolence extrême
  • Bruits de suffocation, gargouillements ou ronflements
  • Respiration lente, faible ou inexistante
  • Incapacité à se réveiller, même si la personne est secouée ou qu’on lui crie après

 Fonctionnement de la naloxone

La naloxone est un antagoniste des opioïdes, c’est-à-dire qu’elle bloque les effets des opioïdes. Quand les opioïdes pénètrent dans l’organisme, ils se lient rapidement aux récepteurs opioïdes. La naloxone bloque les effets des opioïdes en les délogeant de ces récepteurs et en prenant leur place.

La naloxone n’est pas un traitement pour les troubles liés à l’usage d’opioïdes. On l’utilise pour neutraliser temporairement les effets d’une surdose d’opioïdes. Elle peut rétablir la respiration en deux à cinq minutes et est active dans le corps pendant 20 à 90 minutes, alors que les effets de la plupart des opioïdes durent plus longtemps. Autrement dit, les effets de la naloxone risquent de s’estomper avant que les opioïdes n’aient disparu de l’organisme, provoquant ainsi un nouvel arrêt respiratoire. La naloxone peut être administrée plusieurs fois si nécessaire en attendant l’arrivée des secours. Son administration à une personne victime d’une surdose causée par des drogues non opiacées est sans danger. La naloxone est donc un traitement à faible risque et à rendement élevé.

 Les effets de la stigmatisation

Je me souviens de la première fois où l’on m’a donné une trousse de naloxone. En 2018, j’ai subi une intervention chirurgicale et j’ai eu recours à des analgésiques narcotiques. J’ai pratiquement jeté la trousse sur le comptoir. « Je ne suis pas une toxicomane », ai-je craché au pharmacien. Je m’inquiétais de l’image que cela renverrait, et j’étais réticente à l’idée qu’une personne comme moi puisse avoir besoin de naloxone. J’en sais beaucoup plus aujourd’hui : les opioïdes peuvent toucher n’importe qui, dans n’importe quel milieu. La stigmatisation entourant l’usage de substances peut s’étendre à l’utilisation de la naloxone.

« Beaucoup ont l’impression d’encourager l’usage de substances s’ils inversent une surdose », explique Mme Fizzard, qui a aussi un savoir expérientiel en matière d’usage de substances. « Je leur réponds qu’ils aident seulement la personne à respirer et à rester en vie; pas à se droguer. »

Madame Fizzard souligne que les services publics n’ont pas progressé au même rythme que les problèmes d’usage et de surdose d’opioïdes, et ne suffisent pas aux besoins. Elle expose la nécessité que tout le monde soit informé de l’existence d’une trousse de naloxone et puisse y avoir accès, faisant remarquer que le principal obstacle à l’utilisation de la naloxone n’est pas l’administration du médicament, mais la stigmatisation qui entoure son utilisation, notamment sur le lieu de travail.

Administration de la naloxone

La naloxone est offerte sous deux formes : injectable et en vaporisateur nasal. La forme injectable peut être intimidante si vous n’êtes pas habitué aux aiguilles. Madame Fizzard estime que le vaporisateur nasal est rapide et facile.

« Le vaporisateur nasal est beaucoup plus convivial, indique-t-elle. En cas de besoin, il suffit de le déballer, de l’insérer dans la narine de la personne et d’appuyer sur le bouton. Simple. Impossible de se tromper. »

La naloxone au travail

Au Canada, la naloxone n’est pas obligatoire sur le lieu de travail. L’Ontario s’est dotée de lois, enchâssées dans la Loi sur la santé et la sécurité au travail, exigeant que les entreprises qui emploient des personnes à risque de surdose gardent de la naloxone à portée de main et forment leur personnel à son utilisation. Toutefois, il ne s’agit que d’une obligation partielle, car les entreprises qui déterminent qu’elles « n’emploient pas de personnes à risque » ne sont pas tenues de fournir de la naloxone sur le lieu de travail.

En Colombie-Britannique, la naloxone n’est pas obligatoire sur le lieu de travail, mais il existe des outils permettant d’identifier les endroits où elle devrait être accessible. En Alberta, les employeurs peuvent autoriser ou non l’utilisation de la naloxone sur le lieu de travail. S’ils l’autorisent, l’employeur et le travailleur doivent se conformer à une série d’exigences établies par le gouvernement.

Pour les lieux de travail canadiens, les mandats en matière de santé et sécurité relèvent de la compétence des provinces et des territoires, ce qui signifie qu’un mandat à l’échelle du Canada est peu probable. Les provinces et les territoires devront donc décider de surmonter la stigmatisation et les difficultés et légiférer individuellement sur l’inclusion de la naloxone sur le lieu de travail. 

Existe-t-il des obstacles au fait de conserver la naloxone dans une trousse au travail? La trousse a une durée de vie d’environ deux ans (ou jusqu’à son utilisation), après quoi elle doit être remplacée et rachetée pour une centaine de dollars, ce qui pourrait poser problème à certaines entreprises. (Pour une durée limitée, l’Ontario fournit gratuitement des trousses aux entreprises afin d’alléger ce fardeau.) Les éventuels coûts de formation et la stigmatisation sont d’autres obstacles susceptibles d’empêcher les milieux de travail de se procurer des trousses de naloxone.

Votre trousse

 Pour les particuliers, la naloxone est gratuite dans plusieurs provinces et territoires et est offerte en pharmacie, en vente libre ou en ligne. Des tutoriels en ligne montrent comment utiliser les trousses.

Les travailleurs peuvent demander s’il y a une trousse de naloxone sur leur lieu de travail et, si ce n’est pas le cas, demander s’il serait possible d’en mettre une à la disposition du personnel et d’offrir une formation. Les trousses de naloxone sont petites et faciles à ranger dans n’importe quel lieu de travail, et leur utilisation nécessite peu de formation. En Ontario, il suffit de s’identifier comme une personne à risque de surdose pour déclencher l’obligation de fournir une trousse. 

En somme, c’est simple : la naloxone peut sauver des vies, mais seulement si elle est disponible et si les gens sont formés à son utilisation.

Infographie : La drogue contient-elle ce qu’on croit qu’elle contient? (Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances).

Lecture complémentaire : Comment des soins de santé empreints de compassion peuvent modifier le parcours des personnes qui font usage de substances.

Photo : L’auteure à son bureau au travail avec sa trousse de naloxone.

Jessica Ward-King (elle) est une pourfendeuse de préjugés (StigmaCrusher), une militante en matière de santé mentale, une conférencière et une auteure qui aime crier les bienfaits de la naloxone sur tous les toits!
Les points de vue et les opinions exprimés dans cet article appartiennent uniquement à l’auteur(e) et ne représentent pas nécessairement les politiques officielles de la Commission de la santé mentale du Canada.

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