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Le VecteurConversations sur la santé mentale

Renforcez vos capacités d’autocompassion pendant la crise de la COVID-19

La COVID-19 a mis notre monde sens dessus dessous comme un enfant qui agite une boule à neige, et il est difficile de garder nos repères alors que nous avons été catapultés hors de notre zone de confort en pleine tempête et sans savoir quand ceci prendra fin.

Nous abordons chaque journée dans un brouillard d’incertitude, et l’anxiété menace de détruire tous les plans que nous mettons au point pour tenter de nous acclimater à cette « nouvelle vie normale » imprévisible. Mon conseil immédiat pour chacun d’entre nous est de renoncer à nos anciennes attentes, de laisser derrière nous nos anciennes façons de penser et de faire, et de vivre le moment présent dans un esprit de compassion et de pardon.

L’une des leçons les plus difficiles que j’ai apprises, après plusieurs décennies d’essais et d’erreurs, c’est que nous devons d’abord faire preuve d’empathie envers nous-mêmes avant de pouvoir nous tourner vers les autres pour la partager. 

Cela paraît si simple à dire, mais le faire n’est pas si facile.

Je siège au conseil d’administration du refuge The Gathering Place, à St. John’s, T.-N.-L. Je suis régulièrement en contact avec ses dirigeants, et j’ai le cœur brisé en pensant aux défis auxquels ils doivent faire face. Ils s’occupent des plus vulnérables. Les sœurs au grand cœur et le personnel exceptionnellement dévoué qui assurent le bon fonctionnement de l’organisation ont peine à garder leurs portes ouvertes et à répondre aux besoins de personnes qui éprouvent des difficultés à se nourrir et à se loger, et dont plusieurs vivent avec de graves maladies mentales ou des dépendances.

De temps à autre, après une longue journée de travail et un important manque de contacts humains, je suis envahie par un sentiment de tristesse; je me retrouve submergée par un manque profond de la vie normale dont nous avons toutes et tous tant soif. Et puis une pensée finit par s’imposer à moi : Qui suis-je pour me plaindre tandis que tant de gens n’arrivent même pas à combler leurs besoins humains les plus primaires?

Mais il y a un problème avec cette façon de penser. Il n’est pas très avisé de nier ce que nous avons perdu et les défis auxquels nous faisons face simplement parce que quelqu’un d’autre vit une situation pire que la nôtre. Évidemment, il est utile de mettre les choses en perspective. Mais refuser de reconnaître nos propres blessures n’est pas altruiste.

C’est tout le contraire.

Avec ce que nous vivons présentement, hiérarchiser nos souffrances est bien la dernière chose à faire. Nous devons nous approprier notre tristesse et nous donner du temps et de l’espace pour ressentir les nombreuses pertes, grandes ou petites, que nous subissons chaque jour. Le fait que quelqu’un souffre plus que nous n’est pas d’un grand réconfort. Ironiquement, discréditer nos propres sentiments peut en fait endurcir nos cœurs face à la souffrance des autres.

Si vous vous sentez irritable, si vous n’arrivez pas à dormir ou à vous concentrer ou si vous ressentez une fatigue accablante, c’est que votre corps vous envoie un signal. Le deuil peut prendre des formes diverses. Et ne vous y méprenez pas, nous vivons tous une forme de deuil présentement, que nous le disions clairement ou non. 

Il est facile de se laisser aller à un dialogue intérieur négatif lorsque nous sommes brusques avec un proche, laissons la lessive s’accumuler ou n’arrivons pas à atteindre les normes post-COVID que nous nous étions fixées. Nous devons réaliser, accepter et composer avec le fait que l’énergie que nous voudrions utiliser pour faire les choses comme avant est monopolisée par nos cerveaux qui tentent de saisir une nouvelle réalité qui change à la vitesse de l’éclair. Si l’école à la maison est un échec, si souper revient à manger un simple sac de croustilles et si s’habiller rime avec porter son survêtement préféré, ainsi soit-il. Si la barre est plus haute chez vous… eh bien tant mieux pour vous, mais évitez de vous en vanter.

Nous devons nous rappeler qu’un deuil est un deuil, qu’une perte est une perte, et que la tristesse n’est rien d’autre que la tristesse. Notre empathie s’arrête là où nous nous la refusons à nous-mêmes.

Si vous souhaitez développer une nouvelle compétence pendant la pandémie de COVID-19, la meilleure que je puisse vous suggérer est l’autocompassion. Tirez profit de ce traumatisme mondial et servez-vous-en comme d’un outil pour émousser la lame de votre autocritique et pour faire taire la petite voix intérieure qui vous répète sans cesse que vous n’en faites pas assez. Voyez vos échecs perçus comme des tremplins vers le type de croissance personnelle qui ne se fait pas simplement en recommençant à pratiquer un passe-temps, mais qui s’atteint plutôt grâce à la difficile pratique de l’amour de soi : s’aimer non pas malgré ses imperfections, mais à cause de celles-ci.

Hier soir, je me suis donné le droit de pleurer toutes les personnes et toutes les choses qui me manquent. Je me suis assise avec ma tristesse et avec ma colère, et j’ai mis un nom sur toutes ces pertes que j’ai subies. Cela peut souvent ouvrir une porte sur nos blessures et nos traumatismes passés, et nous pouvons avoir l’impression que le monde entier pèse sur nos épaules. Mais ce que je trouve intéressant, et qui en dit long sur la résilience de l’esprit humain, a été confirmé par des chercheurs : souvent, si nous nous autorisons à ressentir pleinement les émotions qui nous habitent pendant 90 secondes, c’est suffisant pour rétablir notre équilibre.

Se sentir désolé pour soi-même est mal vu, à tort. Allez-y. Autorisez-vous à être désolés pour vous-mêmes. Cela pourrait bien être la chose la plus productive que vous aurez faite aujourd’hui.

Ce matin, à mon réveil, je me sentais rafraîchie, revigorée et prête à aider les autres.

En cette époque particulièrement troublée, faire preuve de bonté envers nous-mêmes et panser nos propres blessures avec tendresse est la meilleure façon d’ouvrir nos cœurs et nos esprits aux autres et de les aider à combler leurs besoins.

Auteur:

Louise Bradley

Les points de vue et les opinions exprimés dans cet article appartiennent uniquement à l’auteur(e) et ne représentent pas nécessairement les politiques officielles de la Commission de la santé mentale du Canada.

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