Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
L’étudiant en médecine, soutien aux pairs et champion de la santé mentale Armaghan Alam relève un nouveau défi
Armaghan Alam (que l’on appelle Army) est honnête lorsqu’il raconte d’où vient sa passion pour la santé mentale. À 14 ans, il s’est retrouvé séparé de sa famille par un océan pour aller étudier dans un pensionnat en Ontario.
« Je suis né au Pakistan, mais nous avons déménagé de nombreuses fois », se rappelle Army, qui étudie actuellement la médecine à l’Université de la Colombie-Britannique. « Ma famille vivait alors en Arabie saoudite, mais j’ai choisi de poursuivre mes études ici. » Être aussi loin de sa famille faisait qu’Army se sentait isolé et à la dérive. Le soutien de ses pairs a été une véritable bouée de sauvetage pour lui.
« J’ai rapidement appris la valeur que peut prendre une oreille attentive et, à l’inverse, le fait de tendre la main aux autres », dit-il. Cette conviction l’a suivi à l’Université McGill, où il a contribué à améliorer les initiatives de soutien par les pairs; il est vite devenu un chef de file au sein de son campus.
Aujourd’hui, alors qu’il étudie à l’UBC, il se retrouve au sein d’une culture où il est plus difficile de convaincre les gens à ce sujet. « C’est vraiment ironique, parce que si des personnes ont besoin de décompresser avec des gens qui saisissent bien la profondeur des expériences qu’elles vivent, ce sont bien les étudiants en médecine. »
Or, le « curriculum caché » qui place le sacrifice de soi en haut des objectifs du programme les rend peu enclins à s’ouvrir aux autres.
« Je crois que les fournisseurs de soins de santé devraient ériger un mur entre eux et leurs patients pour pouvoir les soigner », dit-il. « Nous devons être capables de compartimenter ce que nous vivons pour bien faire notre travail. Mais lorsqu’il est question de gérer nos émotions, ce mur peut finir par causer notre perte. »
Tous s’entendent pour dire que depuis quelques années, le voile se lève tranquillement sur ce type de stigmatisation parmi les travailleurs de la santé. Mais Army se demande si les minces incisions faites dans le voile de cette culture de stoïcisme fermement ancrée dans les mentalités ne seront pas recouvertes par le tissu cicatriciel laissé par la pandémie de COVID-19.
« Alors que nous commencions tout juste à parler du fait que les fournisseurs de soins de santé doivent prendre soin d’eux-mêmes, une pandémie mondiale nous est tombée dessus et, tout à coup, on s’est mis à célébrer leur dévouement dans le monde entier. Nous traitons les travailleurs de la santé comme les héros qu’ils ont toujours été, mais quand pourront-ils enlever leurs capes proverbiales et se reposer un peu? Qui prend soin d’eux? »
Army compare la pandémie à une maladie chronique qui doit être gérée plutôt que comme un symptôme aigu que l’on peut soulager rapidement, et peu importe vers où il se tourne, il voit partout ses impacts sur la santé mentale.
« Pour s’occuper de la santé mentale des gens, il faut mettre en place de bonnes politiques sociales, une économie saine et un système de justice qui fonctionne », dit-il. « Cela signifie qu’il faut lutter contre le racisme, les traumatismes intergénérationnels et les obstacles culturels aux soins. » À titre de membre de la communauté immigrante, le point de vue d’Army jette un éclairage particulier sur les difficultés auxquelles sont confrontés les groupes ethnoculturels, au sein desquels la maladie mentale demeure grandement stigmatisée.
Army est un lecteur avide qui a toujours aimé apprendre, et le domaine de la santé mentale lui offre de nombreuses voies vers des études fascinantes. Et lorsqu’il pense à sa future carrière, Army est persuadé que peu importe la spécialisation qu’il choisira de poursuivre, sa passion ne sera jamais loin.
« Que je décide de me spécialiser en psychiatrie ou en chirurgie, le fait est que chaque patient est beaucoup plus que la simple somme de ses diagnostics. Certaines des conversations les plus profondes et révélatrices dont j’ai été témoin se sont produites juste avant qu’un patient parte pour une chirurgie. Regarder sa propre mortalité en face est l’une des expériences les plus puissantes qu’une personne puisse vivre. D’être là, avec eux, à ce moment précis, ça rejoint beaucoup ce qui m’a fait tomber amoureux du soutien par les pairs. »
Histoire de boucler la boucle de ses compétences et de son expérience, Army est heureux de mettre son esprit curieux au service du comité de direction de la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC), où il est impatient d’apprendre auprès d’experts en économie, en justice et en affaires gouvernementales.
« À plusieurs reprises, j’ai eu le privilège de parler avec le Dr David Goldbloom (l’ancien président du conseil de la CSMC), une personne pour qui j’avais une grande admiration pendant mes années de formation. Obtenir une place à une table qu’il a déjà présidée… c’est pour moi un honneur inestimable. »
Suzanne Westover
Une écrivaine d’Ottawa, ancienne rédactrice de discours et gestionnaire des communications à la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC). Casanière, toujours le nez dans un livre, elle prépare un excellent pain au citron (certains diraient qu’elle fait des merveilles en un seul mets) et aime regarder des films avec son époux et sa fille de 13 ans. Le temps que Suzanne a passé à la CSMC a renforcé son intérêt envers la santé mentale, et elle continue d’apprendre toute sa vie sur le sujet.
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Soyez parmi les premières collectivités à adopter l’initiative Enraciner l’espoir
Lorsque la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) a lancé son projet de prévention du suicide Enraciner l’espoir dans huit collectivités du Canada, il s’agissait d’un ambitieux concept visant à renforcer l’expertise de collectivités pour la mise en œuvre d’interventions adaptées à leur contexte tout en élargissant le nombre de pratiques exemplaires fondées sur des données probantes et des outils pouvant être déployés à l’échelle nationale.
Mais puisque la phase de démonstration du projet devait s’échelonner sur une période de cinq ans, d’autres ont commencé à demander comment leur collectivités pouvait y prendre part sans devoir attendre si longtemps. Désireuse de faire connaître le modèle le plus possible, l’équipe de prévention et de promotion de la CSMC a répondu à l’appel en mettant au point une initiative à l’intention des premières collectivités qui adopteront Enraciner l’espoir.
Tout comme pour le projet de démonstration, les stratégies et les activités mises au point par les premières collectivités ayant adopté Enraciner l’espoir seront fondées sur les cinq piliers du projet : soutien spécialisé, formation et réseaux, campagnes de sensibilisation du public, accès sécuritaire aux méthodes et recherche.
« Ce programme émane d’un besoin au niveau des collectivités », a expliqué Nitika Rewari, gestionnaire, programmes de prévention et de promotion de la CSMC. « Lorsqu’elles établiront leur propre plan d’action, les ces collectivités seront les premières à bénéficier des leçons tirées du projet de démonstration jusqu’à ce jour, et ce, avec l’aide de la commission. »
La plupart des conseils seront prodigués par le biais d’une communauté de pratique composée de représentants des premières collectivités à adopter le projet ainsi que de membres du programme de la CSMC.
Les réunions de la communauté de pratique permettront à ces collectivités d’accéder à des outils et à des ressources déjà élaborées dans le projet de démonstration. Cela leur permettra aussi de poser des questions, de laisser savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas et de puiser dans l’expérience vécue par le groupe. Il s’agit là d’un modèle qui a fait ses preuves parmi les huit collectivités d’Enraciner l’espoir, lesquelles continuent de s’appuyer sur leurs réunions de la communauté de pratique pour obtenir des conseils, partager leurs connaissances et établir des contacts.
« La diversité des collectivités représentées dans la communauté de pratique nous a permis d’apprendre beaucoup pour le travail que nous faisons à Iqaluit », a déclaré Opal Mcinnis, détentrice d’un doctorat, gestionnaire territoriale, Division de la santé mentale et de la toxicomanie, gouvernement du Nunavut. « En tant que milieu qui vient tout juste d’entreprendre sa planification, la communauté de pratique a suscité de l’enthousiasme à l’égard de ce que nous pouvons espérer réaliser. »
Denika Ward, coordonnatrice en prévention du suicide au sein dans la Péninsule de Burin, est d’accord pour dire que la communauté de pratique est précieuse. « Cela a permis de réseauter avec des personnes provenant des communautés diverses qui participent au projet Enraciner l’espoir dans l’ensemble du Canada, en plus de contribuer aux effets positifs et durables des efforts de prévention du suicide auprès des résidents de la Péninsule de Burin. »
Même si les huit collectivités impliquées dans le projet de démonstration et les premières collectivités à adopter l’initiative opèrent séparément, toutes les observations découlant de ces démarches contribueront à établir un modèle d’Enraciner l’espoir qui pourra être utilisé à la grandeur du pays. Comme des communautés s’unissent pour trouver les stratégies les plus efficaces pour elles, cela permettra par le fait même de jeter les bases d’un modèle canadien de prévention du suicide issu de nos collectivités.
Selon Ryan Walsh, gestionnaire, programme de prévention et de promotion à la commission de la santé mentale c’est cette combinaison d’incitatifs à court et à long terme qui distingue l’initiative des premières collectivités à adopter le projet. « Peu de collectivités peuvent dire qu’elles ont contribué directement à prévenir le suicide à l’échelle nationale. Les premières à adopter le projet disposent d’une occasion unique de démontrer leur engagement à l’égard de la prévention du suicide, de tirer profit des leçons apprises et d’être à l’avant-garde du modèle canadien. »
Comme M. Walsh n’hésite pas à le dire, la possibilité de faire partie des premières collectivités à adopter le projet ne se limite pas aux grandes régions urbaines, loin de là. « Le projet tire en partie sa force de la diversité des collectivités participantes. Ce qui fonctionne dans une région pourrait s’avérer irréalisable dans une autre. Plus nous pouvons apprendre de ces différences, plus le modèle sera utile pour réduire l’incidence de suicide dans l’ensemble du pays. »
Vous aimeriez que votre communauté soit parmi les premières à adopter Enraciner l’espoir? Envoyez un courriel à Nitika Rewari pour obtenir plus d’information à nrewari@mentalhealthcommission.ca.
Amber St. Louis
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Les efforts d’un regroupement pour accroître l’accès à la psychothérapie
« Parité », « temps d’attente réduits », « moins d’obstacles », « les bons services, au bon moment »
Ce sont quelques-uns des mots et phrases clés employés par les membres du Réseau de mise en œuvre d’une politique de psychothérapie (RMPP) pour décrire ce que l’amélioration de l’accès à la psychothérapie signifie pour eux. Lors de leur première réunion en février dernier, ils ne se doutaient évidemment pas qu’une pandémie allait intensifier encore davantage l’urgence de leur travail.
Le RMPP est composé de dirigeants, de personnes ayant un vécu expérientiel, d’associations canadiennes de fournisseurs de soins de santé, de cliniciens, de chercheurs et d’autres experts. Il a pour objectif de soumettre des recommandations au gouvernement fédéral en vue d’accroître l’accès à la psychothérapie dans le système de soins de santé du Canada.
À titre de secrétaire du Réseau, la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) agit comme facilitatrice impartiale de ses activités. Karen Cohen, chef de la direction de la Société canadienne de psychologie (SCP), co-préside le Réseau aux côtés de la CSMC.
« Des psychothérapies gratuites sont offertes dans les hôpitaux et les centres de soins de santé mentale, mais les listes d’attente sont longues, et bien des gens ne peuvent se permettre les services offerts dans les cabinets privés, indique Louise Bradley, présidente et directrice générale de la CSMC. « Pourtant, ces traitements sont essentiels pour la santé de la population. »
Le Réseau est un lieu de partage d’information, explique Kam Tello, gestionnaire du programme Accès à des services de santé mentale de qualité de la CSMC. « Nous devons examiner les initiatives offertes dans chaque territoire de compétence, évaluer ce qui fonctionne et repérer les lacunes selon différents points de vue. Il s’agit d’un travail collaboratif. »
Le RMPP s’affaire actuellement à rédiger une déclaration sur la nécessité d’élargir l’accès à la psychothérapie. Dans sa préparation du processus et des recommandations pour y parvenir, il se penchera sur les modèles de financement, l’assurance qualité, la mise en œuvre et les paramètres de mesure des soins axés sur les résultats.
Ce travail revêt une importance accrue compte tenu des craintes, des incertitudes, des pertes d’emploi et de l’instabilité économique provoquées par la COVID-19. Pour Mme Cohen, il est devenu encore plus urgent de combler les lacunes en matière d’accès aux services de psychothérapie puisque les personnes, les familles et les communautés sont aux prises avec les répercussions de la pandémie sur leur santé physique et mentale.
Heureusement, les secteurs public et privé de la santé du Canada ont redoublé d’efforts pour offrir des services et du soutien en santé mentale. Notons par exemple l’initiative d’intervention d’urgence de la SCP pour les travailleurs de la santé et les travailleurs sociaux aux premières lignes, l’ajout de séances de counseling et de psychothérapie aux avantages sociaux des employés du gouvernement et le portail de ressources et de counseling gratuits Espace mieux-être Canada du gouvernement fédéral.
Or, même si ces améliorations marquent un pas dans la bonne direction, bon nombre d’entre elles relèvent malheureusement de programmes particuliers et pourraient être temporaires. Des investissements durables dans les services de santé mentale doivent être réalisés pour améliorer le bien-être de la population et traiter les maladies à long terme.
« C’est pourquoi le RMPP est axé sur les solutions à long terme », explique Mme Tello. « Avec la COVID-19 qui nous guette, en plus des nombreux programmes et services qui ont été créés en réponse à la pandémie, la population canadienne continue d’avoir besoin d’importants traitements de santé mentale fondés sur des données probantes, et ce possiblement plus que jamais. »
Pour élaborer des recommandations qui correspondent à la réalité canadienne, le RMPP prend exemple sur d’autres pays. Le Royaume-Uni et l’Australie sont dotés de programmes d’accès élargi, financés par des modèles de subventions et d’assurance-maladie, qui font office d’études de cas déterminantes pour la création de solutions canadiennes. (Visitez la page Améliorer l’accès de la CSMC pour examiner ces exemples de plus près.)
Même si le RMPP a encore beaucoup à faire, ses membres sont encouragés par le changement de ton dans la discussion sur la santé mentale.
« De plus en plus, on semble reconnaître que la santé mentale fait partie de la santé et qu’elle devrait être traitée de façon égale à la santé physique », poursuit Mme Tello. Les employeurs manifestent davantage d’intérêt, la couverture médiatique est accrue et on parle davantage de l’accès et de l’importance de celui-ci. »
Mme Bradley abonde dans le même sens. « L’accès à de meilleurs soins de santé mentale pourrait être un facteur déterminant dans la lutte contre une pandémie de maladie mentale qui ferait écho à la pandémie de COVID-19 de laquelle nous commençons à émerger. S’il y a un point positif aux difficultés que nous affrontons actuellement, c’est peut-être la reconnaissance que la santé physique ne représente que la moitié de l’équation. Il n’y a pas de santé sans santé mentale. »
À mesure que la discussion sur la parité entre santé physique et santé mentale prend de l’ampleur, le RMPP s’efforce de poser des gestes concrets en ce sens. Par ses recommandations judicieuses, le Réseau aspire à positionner le Canada comme chef de file mondial en matière d’accès élargi à la psychothérapie.
Pour Maureen Abbott, gestionnaire du programme Accès à des services de santé mentale de qualité de la CSMC, la composition du Réseau lui-même rend un tel résultat plus probable. « Les membres apportent des expériences personnelles et professionnelles pertinentes en lien avec l’accès à la psychothérapie. Mais l’une des grandes forces du groupe est qu’il respecte et estime importante la diversité des opinions et des points de vue lorsqu’il recherche des consensus pour la prise de décisions. »
Mise à jour, le 2 février 2022 : vous pouvez maintenant lire le rapport du RMPP, Le temps est venu : Considérations relatives à un programme national de psychothérapie.
Amber St. Louis
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Une nouvelle trousse d’outils pour promouvoir la sécurité psychologique en milieu de travail pendant la pandémie de COVID-19
La COVID-19 oblige les employeurs de tous les secteurs à revoir leurs façons de faire. Au Canada, le récent assouplissement des restrictions a permis à de nombreuses entreprises de reprendre leurs activités et de recommencer à accueillir leurs employés en milieu de travail. Mais travailler pendant une pandémie n’a rien d’habituel et les changements apportés par les employeurs peuvent avoir un impact radical sur la santé mentale et physique de leurs employés.
« Créer un milieu de travail sain n’implique pas seulement de protéger la santé physique des gens », dit Liz Horvath, gestionnaire, Santé mentale en milieu de travail à la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC). « Il faut également assurer leur sécurité psychologique. Nous devrons composer avec les répercussions de la pandémie pendant un certain temps, mais les employeurs ont un important rôle à jouer pour prendre des mesures proactives afin d’avoir une longueur d’avance sur l’augmentation de la prévalence des maladies mentales prévue ».
Afin d’aider les employeurs à assumer ces nouvelles responsabilités, l’équipe de Changer les mentalités de la CSMC a créé la Trousse d’outils pour l’intégration de la santé mentale aux activités pendant la pandémie de COVID-19. Cette trousse d’outils regroupe des lignes directrices, des fiches-conseils, des vidéos, des guides de discussion et d’autres ressources pour aider les employeurs et les travailleurs à incorporer la santé mentale dans tous les aspects de leurs milieux de travail.
Une des ressources de la trousse d’outils qui sera publiée prochainement comprendra un ensemble de lignes directrices ayant pour but d’aider les employeurs à aborder les principaux facteurs liés au milieu de travail qui peuvent affecter la santé mentale des membres du personnel pendant une pandémie. Ces facteurs sont fondés sur la Norme nationale du Canada sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail, un cadre élaboré par la CSMC et le Groupe CSA pour aider à promouvoir la santé mentale et à prévenir les préjudices psychologiques au travail.
« Ces lignes directrices n’ont pas seulement pour but de réagir à la pandémie de manière ponctuelle », explique Mme Horvath. « Nous voulons encourager les employeurs à intégrer la santé mentale de façon proactive à leurs activités afin de traverser la pandémie actuelle et d’être mieux outillés pour faire face à d’éventuelles nouvelles crises. Bien que le Canada s’en sorte relativement bien pendant la pandémie actuelle, nous devons nous préparer à affronter les nouvelles vagues qui pourraient surgir ».
Les lignes directrices encouragent les personnes en position d’autorité à ne pas oublier que les travailleurs peuvent faire face à diverses difficultés personnelles à l’extérieur du travail en temps de pandémie. « Lorsque nous parlons de rendement, nous devons parler de santé mentale », dit Mme Horvath.
« Le stress, c’est cumulatif », ajoute-t-elle. « Les difficultés auxquelles nous faisons face à l’extérieur du travail continuent de nous affecter lorsque nous sommes au travail, et vice-versa. En intégrant la santé mentale des travailleurs à leurs activités, les dirigeants peuvent réduire leur stress global. S’ils gèrent bien l’énergie, les gens peuvent bien travailler et bien vivre ».
Afin de soutenir les travailleurs pendant la pandémie, les lignes directrices encouragent les gestionnaires
- à utiliser l’écoute empathique
- à comprendre l’impact psychologique des changements apportés au milieu de travail physique et à en tenir compte
- à fournir à leurs travailleurs un espace sécuritaire pour partager ouvertement leurs besoins et leurs préoccupations
- à se préparer à mettre en place des mesures d’adaptation pour les travailleurs qui ont besoin d’un soutien supplémentaire.
Le guide aborde aussi la question de la stigmatisation puisque bien souvent, les travailleurs n’osent pas parler de leurs préoccupations relatives à la santé mentale, soit parce qu’ils ont peur que leurs pairs les jugent, soit à cause de l’autostigmatisation. Les milieux de travail qui offrent de la formation au personnel et qui encouragent les discussions franches à propos de la santé mentale peuvent réduire la stigmatisation en milieu de travail et faire en sorte que les employés qui ont besoin d’aide la demandent plus tôt. Les employeurs doivent également gérer l’augmentation des blâmes et des paroles blessantes entre employés en s’assurant que ceux-ci reçoivent une protection psychologique contre la discrimination et le harcèlement associés à la stigmatisation sociale et à la xénophobie.
La bonne nouvelle, selon ce que démontre la recherche, est que le fait de gérer les urgences et les désastres de manière adéquate peut avoir des répercussions positives sur la santé mentale des employés, notamment un meilleur moral, une plus grande résilience et une augmentation de la compassion.
« La pandémie rassemble les gens d’une manière inédite », remarque Mme Horvath. « Nous pouvons recréer cet esprit de connexion aux autres et de soutien en milieu de travail, pourvu que nous soyons déterminés à fournir les efforts nécessaires ».
Amber St. Louis
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Virage virtuel pour fournir du soutien aux travailleurs essentiels et aux étudiants du postsecondaire
À la mi-mars, alors que le monde était mis sur pause, l’équipe de Changer les mentalités de la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) savait qu’elle devait se retrousser les manches.
« Nos formations en personne s’étaient arrêtées littéralement du jour au lendemain », de dire Mike Pietrus, directeur du programme, lequel s’occupe du volet formation de la CSMC. « Mais nous étions conscients que les travailleurs essentiels devaient avoir accès à nos formations sur la santé mentale et la résilience. »
Et c’est exactement ce que l’équipe s’est efforcée de faire.
« S’adaptant à une pandémie mondiale et au télétravail, tout en prenant soin de leurs familles, les membres de l’équipe ont complètement remanié le programme de formation pour qu’il soit offert par des moyens virtuels, et ce, tout à fait gratuitement, aux gens qui travaillaient sur la ligne de front pendant cette crise », explique monsieur Pietrus.
Louise Bradley, présidente-directrice générale de la CSMC, est encore émerveillée de cet exploit. « Il s’agit-là d’une réalisation pour le moins héroïque », a-t-elle déclaré, tout en faisant remarquer que plus de 400 cours ont été offerts gratuitement à plus de 4 000 travailleurs essentiels.
Les spécialistes de la formation de la CSMC ont pris les éléments les plus pertinents des formations Premiers soins en santé mentale et l’Esprit au travail, en ont fait des versions interactives et comprimées d’une durée de deux heures, pour apprendre aux gens comment s’occuper de leur santé mentale et de celle des autres. Un autre cours d’une durée d’une heure a été créé dans le but précis d’aider les gestionnaires à prendre soin de leurs équipes.
Pietrus a fait remarquer que cette expérience a exigé de l’équipe qu’elle fasse ses devoirs et qu’elle apprenne les meilleures pratiques en matière de formation virtuelle. « Mais grâce à cette incroyable réaction, nous sommes maintenant fin prêts à offrir nos formations les plus appréciées en version virtuelle », a-t-il mentionné, faisant ainsi référence à la série de formations qui comprend Premiers soins en santé mentale et l’Esprit au travail, de même que leurs variantes.
« Nous allons commencer par l’Esprit curieux, postsecondaire », a-t-il précisé, qui fournit de la formation sur la santé mentale et la résilience à l’intention des étudiants des collèges et des universités. « Nous nous sommes dit qu’il était naturel de commencer par eux. Ils sont non seulement plus à l’aise avec les interactions virtuelles, mais ils devront bientôt s’adapter à un milieu scolaire extrêmement différent et auront alors besoin d’aide pour relever toute une série de nouveaux défis. »
À compter du mois d’août, les établissements d’enseignement postsecondaire seront en mesure d’offrir cette formation qui a elle aussi subi une importante transformation.
« Nous avons beaucoup appris lorsque nous avons préparé nos formations gratuites pendant la crise », a déclaré Rebecca Richardson, spécialiste de la formation pour les programmes Premiers soins en santé mentale et Changer les mentalités. « On ne peut pas simplement prendre une formation habituellement offerte en personne et l’offrir telle quelle en ligne. Ça ne fonctionne pas. Nous avons vraiment dû faire nos recherches et bûcher afin de nous assurer de réellement établir un contact avec les participants. »
our ce faire, il a fallu étendre le cours pour en faire quatre modules de 45 minutes ou un cours d’une durée de trois heures. De petits groupes auront l’occasion de trouver des solutions à des situations difficiles, d’obtenir l’avis des autres participants grâce à des sondages et des jeux-questionnaires en ligne et de veiller à ce que toute personne chez qui la formation déclenche une réaction soit mise en contact avec du soutien en santé mentale.
« Nous devions trouver un moyen d’organiser toutes ces étapes », a déclaré M. Pietrus. Cela a donné lieu à la création d’un nouveau rôle dans la classe virtuelle afin de fournir du soutien à l’animateur. « Nous engageons des producteurs pour gérer les aspects techniques de la transmission du cours pour que le formateur puisse se consacrer strictement à enseigner la matière. »
Les résultats de la mise à l’essai qui a eu lieu à l’Université Bishop et l’Université Laurentienne parlent d’eux-mêmes.
« Plus de 82 pour cent des participants avaient la conviction qu’ils pourraient mettre en pratique les connaissances et les compétences acquises dans leur quotidien », a dit Mme Richardson. « Après avoir observé les deux mises à l’essai, j’étais encouragée et inspirée par l’énergie et la passion des étudiants, ainsi que par leur volonté de discuter de sujets difficiles, même dans un cadre virtuel. »
Chloe Kendall, une étudiante de l’Université Bishop, a dit que « le cours est extrêmement instructif. Il m’a aidée à comprendre ma propre santé mentale et à prendre conscience de la façon dont les autres peuvent se sentir. Les connaissances que j’ai acquises en deux jours me serviront toute ma vie. »
Mme Richardson est convaincue que cette volonté de montrer sa vulnérabilité et de chercher à obtenir de l’aide sera essentielle si l’on veut favoriser le bien-être mental des étudiants lorsqu’ils retourneront en classe cet automne.
« Plusieurs chercheront des moyens de composer avec le stress généré par l’apprentissage à distance et l’isolement social, ainsi que des façons de discuter et de donner un sens à ce qu’ils ont vécu au cours des derniers mois. Le fait d’adapter le cours l’Esprit curieux à un cadre virtuel juste à temps pour le semestre de l’automne permettra aux établissements postsecondaires d’aider les étudiants à relever ces défis. »
Visitez la page l’Esprit curieux postsecondaire virtuel pour voir où ces cours sont offerts.
Suzanne Westover
Une écrivaine d’Ottawa, ancienne rédactrice de discours et gestionnaire des communications à la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC). Casanière, toujours le nez dans un livre, elle prépare un excellent pain au citron (certains diraient qu’elle fait des merveilles en un seul mets) et aime regarder des films avec son époux et sa fille de 13 ans. Le temps que Suzanne a passé à la CSMC a renforcé son intérêt envers la santé mentale, et elle continue d’apprendre toute sa vie sur le sujet.
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Soutenir la santé mentale des travailleurs de la santé pendant la pandémie de COVID-19
« Les travailleurs de la santé ont toujours été des héros à mes yeux », dit Louise Bradley, présidente-directrice générale de la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC), qui est elle-même infirmière autorisée et ancienne administratrice d’hôpital. « Mais lorsqu’une crise d’une ampleur aussi phénoménale que celle de la COVID-19 éclate, nous en demandons encore davantage à une main-d’œuvre déjà débordée. »
Ed Mantler, vice-président des Programmes et priorités à la CSMC, est du même avis. « Avant la pandémie, 40 pour cent des médecins et des infirmiers et infirmières étaient déjà à des niveaux avancés d’épuisement professionnel. Nous travaillions donc déjà très fort pour créer une suite de modules de formation et de ressources pour soutenir le bien-être mental de cette main-d’œuvre essentielle. »
Maintenant, ces outils sont plus pertinents et importants que jamais.
« Nous savons que les répercussions psychologiques d’une pandémie peuvent engendrer des conséquences sérieuses pour les travailleurs de la santé », affirme Mme Bradley, qui cite une étude qui estime que 29 à 35 % de ces travailleurs ont vécu un haut niveau de détresse pendant l’éclosion de SRAS qui a eu lieu dans un hôpital de Toronto. Une étude similaire menée auprès du personnel médical à Taiwan a montré que 93,5 % d’entre eux considéraient l’épidémie de SRAS comme une expérience traumatisante.
Heureusement, les travailleurs de la santé n’ont pas à porter ce fardeau sur leurs seules épaules. Un éventail de ressources en santé mentale sont désormais disponibles pour stimuler leur résilience et pour accroître leur bien-être.
Le Centre de Toxicomanie et de santé mentale, par exemple, offre un carrefour de ressources spécialement destiné aux travailleurs de la santé pendant la pandémie de COVID-19 qui fournit des conseils et des vidéos utiles, ainsi que des liens vers des ressources de soutien externes.
La CSMC élabore depuis plusieurs années diverses ressources en santé mentale destinées aux travailleurs de la santé, incluant une série de webinaires publiée récemment qui porte sur les autosoins pour les travailleurs et qui fournit des conseils aux dirigeants de la santé durant la COVID-19.
« Il est important d’être conscients que le domaine des soins de santé est un domaine exigeant, et que plusieurs des problèmes de santé mentale auxquels font actuellement face les travailleurs de la santé ne disparaîtront pas avec la fin de la pandémie », dit Mme Bradley. Elle presse les organismes de soins de santé d’utiliser des mesures éducatives proactives destinées aux travailleurs, comme des affiches comme celle-ci pour rappeler aux travailleurs de quelle manière ils peuvent contrôler leur anxiété et leur consommation de substances.
Pour M. Mantler, « bien que les ressources offertes aux fournisseurs individuels soient importantes, l’amélioration du bien-être mental passe également par la transformation d’une culture au sein de laquelle le stoïcisme est la norme depuis beaucoup trop longtemps ».
Souvent, pour améliorer quelque chose, il faut d’abord l’évaluer. Prendre soin des travailleurs de la santé — Outils d’évaluation est une ressource utile pour le faire. Elle explore une gamme de facteurs psychosociaux pour aider les organismes de soins de santé à déterminer les secteurs vulnérables et à prendre les mesures nécessaires pour améliorer la santé et la sécurité psychologiques.
Pour implanter une culture de bien-être mental, il faut aussi une bonne dose d’engagement. Un bon moyen de comprendre ce qu’une organisation fait de bien et ce qu’elle peut améliorer est la Norme nationale du Canada sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail (la Norme), un cadre qui fournit des lignes directrices exhaustives pour promouvoir la bonne santé mentale en milieu de travail.
« Il y a plusieurs années, j’ai été embauchée pour diriger un grand hôpital universitaire », se souvient Mme Bradley. « Au départ, j’avais l’impression que je ne possédais pas les compétences requises pour mener cette mission à bien. Mais j’ai vite compris que je n’étais pas là pour dire aux experts médicaux comment faire leur travail. On m’avait plutôt embauchée pour transformer la culture organisationnelle au sein de laquelle ils travaillaient. »
Afin d’aider à orienter la mise en œuvre de la Norme dans un contexte de soins de santé, la CSMC a participé à l’élaboration de la Trousse d’outils Prendre soin des travailleurs de la santé, qui comprend des témoignages d’organismes de soins de santé qui ont adopté la Norme et près de 40 outils pratiques pour aider les organisations à la mettre en place.
Pour plus d’outils et de ressources sur les soins de santé de la CSMC, veuillez consulter notre liste complète.
Pour Louise Bradley, les efforts pour soutenir les travailleurs de la santé ont commencé bien avant la pandémie de COVID-19, et ils se poursuivront longtemps après la fin de celle-ci. « Lorsque les masques tomberont et que le monde ouvrira à nouveau, les travailleurs de la santé continueront à être des héros, et ils mériteront toujours autant d’avoir tout notre soutien. »
Amber St. Louis
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Semaine National de prévention de suicide (QC)
Depuis 30 ans maintenant, l’Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) consacre la première semaine de février à encourager les conversations sur la prévention du suicide.
Pourtant, pendant que vous lisez ceci en prenant votre café matinal, aujourd’hui, trois Québécois décèderont par suicide et 11 autres seront hospitalisés.
Ce sont nos amis, nos proches, nos collègues, nos voisins.
Beaucoup de choses ont changé depuis 30 ans, et grâce aux efforts de pionniers comme l’AQPS, à mesure que notre compréhension s’améliore, nous avons dissipé de nombreux mythes.
Nous savons maintenant, par exemple, que le simple fait de demander à une personne si elle a des pensées suicidaires ne « l’incitera pas à se suicider ».
Mais il nous reste toutefois encore beaucoup de travail à abattre, notamment au chapitre de la sensibilisation.
De nombreuses études ont démontré que presque toutes les personnes qui décèdent par suicide avaient rencontré leur médecin de famille au cours des six mois précédents.
Or, quelles sont donc les questions que les prestataires de soins primaires ne posent pas et pourquoi? Et comment pouvons-nous mieux les outiller pour répondre aux besoins de santé mentale de leurs patients?
Au-delà de la sensibilisation des professionnels de la santé, nous savons aujourd’hui qu’il est essentiel de sensibiliser le grand public — un rôle qui incombe aux gouvernements et a la société civile, mais également aux médias.
Or, quoique nous ne pensons plus qu’il soit constructif d’exiger que les médias gardent le silence sur les cas de suicide, nous reconnaissons qu’il est crucial d’aborder le sujet de façon responsable.
Entre éviter une couverture sensationnaliste et faire preuve de retenue quant à la révélation des méthodes utilisées, il existe des moyens d’encadrer un dialogue public sur le suicide qui a terme vont permettre de sauver des vies.
Aujourd’hui nous savons, avant tout, que, si le suicide résulte d’une convergence complexe de facteurs sociaux et biologiques, nous pouvons ensemble travailler à forger une société où la prévention est une priorité commune.
La Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) a depuis longtemps fait de la prévention du suicide un élément important de son travail, et est toujours reconnaissante des occasions qu’elle a de collaborer avec ses partenaires du Québec et d’apprendre de leur expériences.
Grâce à l’expansion d’Enraciner l’espoir, un projet communautaire de prévention du suicide, la CSMC touche environ 1,8 million de personnes dans huit communautés a l’échelle du Canada et confirme que les solutions doivent tenir compte du contexte local et être axées sur la communauté.
Le Dr Brian Mishara, chercheur principal d’Enraciner l’espoir, expert de renommée internationale sur le suicide, professeur à l’Université du Québec à Montréal et cofondateur de l’AQPS, l’a très bien dit lors du lancement du programme en septembre 2019.
Décrivant les efforts des psychiatres et des psychologues qui se sont rendus au Rwanda dans la foulée du génocide, il a expliqué que leurs interventions avaient fait plus de mal que de bien. En fait, leur approche globale face au traumatisme, de l’isolement des patients, à leur traitement dans des salles de consultation, en passant par le fait de leur faire revivre leurs expériences, était aux antipodes de ce qui était adapté d’un point de vue culturel. Pour se sentir en sécurité, les patients avaient besoin d’être dehors au soleil, entourés de leur famille, se rappelant des moments heureux.
Pour ainsi dire, même si les stratégies de prévention du suicide diffèrent peut-être selon la communauté, nous partageons avec nos partenaires du Québec et de partout au Canada la ferme résolution de réduire les ravages du suicide et un plan pour mettre à contribution les forces qu’ils connaissent le mieux.
Dans 30 ans, j’espère que les cas de suicides seront parmi les événements les plus rares parce que nous aurons réussi à encourager des conversations ouvertes et attentionnées, et à mettre en place des mesures de soutien et des ressources pour sauver des vies.
Aujourd’hui, au Canada, 11 personnes décèderont par suicide. Demain, ensemble, nous pouvons faire en sorte que cela ne soit plus le cas.
Cet article a paru à l’origine dans Le Droit du 11 février 2020.
Louise Bradley
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Exploration des services de soutien spécialisés pour les travailleurs de première ligne
En ce mois de mars, nous célébrons le Mois national du travail social et soulignons la contribution des travailleurs sociaux. Chacune de leurs journées est unique, qu’il s’agisse d’orienter une personne ayant des antécédents de consommation de substances vers un logement supervisé, d’aider une survivante de violence sexospécifique à trouver des solutions accessibles pour la garde de ses enfants ou d’élaborer des politiques de santé mentale pour les étudiants de niveau postsecondaire. Mais chaque journée exige d’eux un altruisme que peu de professions nécessitent.
Évidemment, l’altruisme comporte son propre lot d’écueils. Les travailleurs sociaux sont confrontés à des situations de pauvreté infantile, d’agression sexuelle, sont témoins des inégalités structurelles de notre monde. De telles expériences les exposent à des traumatismes indirects continus et entraînent souvent de l’usure de compassion. Partout, comme le fait remarquer Polly Leonard, gestionnaire de programme à la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) et travailleuse sociale autorisée, « un certain stoïcisme peut apparaître chez les travailleurs sociaux, qui ont l’impression que leur détresse est dérisoire en comparaison avec celle de leurs clients. »
Par exemple, vers qui les travailleurs sociaux peuvent-ils se tourner pour obtenir du soutien lorsque leurs amis et collègues jouent aussi le rôle des thérapeutes qu’ils sont encouragés à consulter ? « Si vous décidez de demander une aide extérieure, vous devez chercher plus loin que votre cercle immédiat pour éviter de vous adresser à un ami ou un collègue œuvrant aussi comme thérapeute personnel », affirme Mme Leonard.
Louise Bradley, présidente et directrice générale de la CSMC, abonde dans le même sens. « Les travailleurs sociaux sont les héros cachés des professions de soins de santé. Pendant que les pompiers et les policiers font la une pour leurs démonstrations de courage, les travailleurs sociaux doivent puiser profondément en eux-mêmes pour trouver de la compassion tous les jours. Non seulement ils se portent à la défense de personnes sous-desservies et vulnérables, mais ils sont aussi régulièrement exposés à des traumatismes indirects pouvant causer des blessures de stress opérationnel qu’on associe souvent à d’autres premiers intervenants. »
Mme Leonard résume parfaitement la situation : « Après avoir discuté entre nous des cas dont nous nous occupons, on dirait que tous les autres sujets sont futiles. »
C’est l’une des raisons pour lesquelles l’Association canadienne des travailleuses et travailleurs sociaux encourage les travailleurs sociaux autorisés à bien comprendre les répercussions de leur travail sur leur bien-être.
Peu de gens seront surpris d’entendre que les travailleurs de la santé et d’autres premiers intervenants font face à des difficultés semblables à celles des travailleurs sociaux.
Le stress chronique et l’épuisement sont communs dans le domaine de la santé ; en effet, de nombreux travailleurs déclarent souffrir de troubles liés au stress, comme la dépression, l’anxiété et les troubles liés à la consommation de substances. Les outils Prendre soin des travailleurs de la santé de la CSMC peuvent aider les organisations de santé à cerner les secteurs préoccupants et à améliorer la santé et la sécurité psychologiques de leurs employés.
Les ambulanciers paramédicaux, les pompiers et les policiers, qui souffrent de TSPT à un taux deux fois plus élevé que la population générale, sont également plus à risque de souffrir de dépression, de consommer des substances et d’avoir des pensées suicidaires.
Pour les paramédicaux, qui affichent les taux de maladie mentale les plus élevés au pays, le Groupe CSA a élaboré la Norme pour les paramédicaux, dont les normes spécifiques au milieu de travail peuvent aider à faire la lumière sur la stigmatisation, à déterminer les risques d’ordre psychologique et à promouvoir le bien-être mental.
Pour les travailleurs actifs dans d’autres services d’intervention en cas d’urgence, la formation L’esprit au travail Premiers intervenants (EATPI) est conçue pour promouvoir le bien-être mental, renforcer la résilience et réduire la stigmatisation entourant la maladie mentale. Basé sur le modèle du continuum en santé mentale, le cours EATPI enseigne aux premiers intervenants à reconnaître les blessures psychologiques chez leurs pairs et chez eux-mêmes. Un complément destiné aux familles est également offert pour faciliter l’amorce d’un dialogue constructif et éclairé au sein des familles.
Heureusement, grâce à des outils soigneusement élaborés, ces travailleurs de première ligne ont accès à des ressources en santé mentale aussi uniques que les situations auxquelles ils sont confrontés, qu’ils soient à la une du journal ou dans les faits divers.
Amber St. Louis
Restez à l’affût!
Abonnez-vous au magazine Le Vecteur dès aujourd'hui!
Articles Connexes
Améliorer l’accès aux services de psychothérapie et encourager les femmes à embrasser des carrières scientifiques
Quand la Dre Patricia Lingley Pottie était sur le point d’obtenir son diplôme d’études secondaires, sur la rive sud de la Nouvelle-Écosse, au début des années quatre-vingt, elle a passé un nouveau test d’aptitude informatique qu’elle qualifie d’« ancêtre primitif de l’intelligence artificielle d’aujourd’hui, bien qu’avant-gardiste à cette époque ».
« Les résultats de l’évaluation indiquaient trois options de plan de carrière qui me convenaient », dit-elle, fraîchement débarquée de l’avion en provenance des Territoires du Nord-Ouest. L’Institut des familles solides (IFS), dont elle est présidente, chef de la direction et cofondatrice, vient tout juste de recevoir des fonds du gouvernement des T. N.-O. et de Bell cause pour la cause afin d’élargir son offre de services.
L’IFS redéfinit les soins de santé mentale de qualité. Il propose des solutions rentables aux obstacles souvent associés à l’accès aux soins de santé mentale et qui entraînent d’excellents résultats. Les formateurs de l’IFS sont hautement qualifiés pour offrir aux familles des programmes éprouvés et fondés sur les compétences, dans le confort de leur foyer (par téléphone et Internet).
« Je ne saurais trop insister sur l’importance d’une telle flexibilité », a déclaré Patricia. « De nombreuses familles qui font appel à nous s’approchent du seuil de pauvreté, alors s’absenter du travail n’est pas une option. L’approche adoptée par l’IFS permet aux clients de ne pas manquer le travail. De plus, poursuit-elle, son irrépressible passion remontant à la surface, notre approche axée sur le client est offerte sans liste d’attente et sans fardeau financier ! »
À la lumière des premiers résultats du test d’aptitude, Patricia n’aurait jamais imaginé la tournure que prendrait sa carrière. « À ce moment-là, dit-elle, mes trois meilleurs choix de carrière étaient : femme au foyer, coiffeuse et infirmière. » Se questionnant à voix haute sur le rôle du sexe et du genre dans cette boule de cristal informatisée, Patricia souligne qu’« il y a tant d’autres portes ouvertes aux femmes aujourd’hui, et nous en voyons de plus en plus dans le domaine scientifique. »
Son début de carrière comme infirmière à l’hôpital SickKids de Toronto, en grande partie dans l’unité de néphrologie, a atteint un tournant décisif lorsque l’une de ses plus jeunes patientes, une petite fille nommée Judy, est décédée d’une maladie génétique rare après avoir subi 28 chirurgies douloureuses et trois greffes.
« Au cours des trois années où j’ai pris soin de Judy, je l’ai regardée endurer plus que la plupart des gens dans toute une vie. C’est elle qui m’a incitée à vouloir guérir les gens, plutôt qu’à prendre soin d’eux » a expliqué Patricia. « En tant qu’infirmière, je pouvais soulager la souffrance, ce qui est essentiel. Mais en tant qu’étudiante qui avait toujours adoré la chimie, les mathématiques et les sciences, une grande partie de moi voulait faire de la recherche, où je sentais qu’il y avait une possibilité d’en apprendre davantage sur la façon de prévenir et de guérir les maladies. »
Trois décennies plus tard — au cours desquelles elle a atteint de nombreux objectifs impressionnants que son test d’aptitude n’aurait jamais laissé présager —, Patricia est une chercheuse de renommée mondiale au Centre de santé IWK, à Halifax, et professeure adjointe en psychiatrie à l’Université Dalhousie. En collaboration avec le co-chercheur et Dr Patrick McGrath (cofondateur et président du conseil d’administration de l’IFS), Patricia est en bonne voie de transformer complètement le modèle de prestation des services de santé mentale.
« L’innovation est importante, et c’est la raison pour laquelle je suis si fière de la façon dont nous avons conçu la technologie pour offrir un enseignement à distance de haute qualité et de la formation en compétences comportementales pour une fraction du coût des programmes traditionnels. »
Patricia parle d’IRIS, une plate-forme logicielle novatrice si sophistiquée et intégrée au fonctionnement de l’IFS qu’« elle » est considérée comme un membre à part entière de l’équipe. « IRIS peut répondre à toutes nos questions, car nous l’avons entièrement créée pour être l’outil le plus réactif, convivial et utile que nous pouvions imaginer. »
Nous avons fait tellement de chemin depuis les débuts de l’intelligence artificielle que nous comprendrions si vous croyiez qu’IRIS était un être humain qui pense et éprouve des sentiments. Bien que l’enthousiasme de Patricia soit à son apogée quand elle décrit les capacités d’IRIS, elle souligne que l’exploitation d’une telle plate-forme n’est pas une mince affaire pour un organisme sans but lucratif.
Ayant attiré les programmeurs avec la promesse d’« un travail qui changera la face du monde », elle espère que sa petite équipe de scientifiques informatiques concevra bientôt une application qui sera la clé de voûte du modèle de soins par paliers de l’IFS.
« Si je gagnais à la loterie demain, nous créerions une application que les gens pourraient utiliser en ligne et hors ligne, non seulement les habitants des collectivités rurales et éloignées du Canada, mais aussi le personnel militaire outre-mer », s’est réjouie Patricia (son plus grand défi est d’expliquer aux bailleurs de fonds potentiels à quel point IRIS est coûteuse à maintenir et à faire progresser). « J’utiliserais aussi ces fonds pour assurer un accès équitable à nos programmes pour tous les Canadiens ! »
Le succès de l’IFS est dû en grande partie au caractère indomptable de Patricia. Quand on lui demande ce qui la stimule, elle s’exclame : « Les données ! Les informations que nous déterrons valent plus que de l’or ! Avec les données, nous pouvons rendre compte des résultats à nos clients et bailleurs de fonds, et nous savons quels changements sont nécessaires pour répondre aux besoins de nos clients ! »
La générosité qui anime Patricia teinte ses moindres gestes. Sa seule frustration est d’être incapable d’aider toutes les familles qui frappent à sa porte.
Mais là où elle peut provoquer des changements, elle le fait. Patricia offre du mentorat à presque tous les leaders potentiels qui passent à l’IFS. Elle croit au pouvoir d’investir dans la prochaine génération d’innovateurs et conseille aux jeunes qui cherchent leur voie :
« Trouvez un mentor dont les croyances, la vision et les aspirations correspondent aux vôtres, puis demandez-lui de vous rencontrer. Vous serez étonné de voir combien accepteront. Rien n’arrête les jeunes d’aujourd’hui. Ils ne se limitent pas aux piètres résultats d’un test d’aptitude. »
Et il s’avère que Patricia non plus.
Suzanne Westover
Une écrivaine d’Ottawa, ancienne rédactrice de discours et gestionnaire des communications à la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC). Casanière, toujours le nez dans un livre, elle prépare un excellent pain au citron (certains diraient qu’elle fait des merveilles en un seul mets) et aime regarder des films avec son époux et sa fille de 13 ans. Le temps que Suzanne a passé à la CSMC a renforcé son intérêt envers la santé mentale, et elle continue d’apprendre toute sa vie sur le sujet.